[-] Klaq@jlai.lu 8 points 3 months ago

Idem. Gros soulagement (temporaire).

[-] Klaq@jlai.lu 9 points 4 months ago

Faudrait pas non plus protéger des Industries du coin. C'est compliqué l'économie.

[-] Klaq@jlai.lu 9 points 4 months ago

Ce petit tacle de la VDN <3

[-] Klaq@jlai.lu 10 points 4 months ago* (last edited 4 months ago)

C’est du jamais-vu dans l’histoire de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH). Personne, à Matignon, n’a répondu à son invitation pour la remise de son rapport annuel sur la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie, publié ce jeudi 27 juin. Un rendez-vous en principe incontournable pour le premier ministre depuis plus de trois décennies.

A la veille des élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet, les chiffres révélés dans ce rapport – fondé sur des entretiens menés en face-à-face auprès d’un échantillon représentatif de 1 210 personnes – sont pourtant alarmants : l’indice longitudinal de tolérance, qui mesure chaque année l’évolution des préjugés chez les Français sur une échelle de 0 à 100 (plus l’indice se rapproche de 100, plus le niveau de tolérance est élevé), fléchit de 3 points en un an, pour atteindre 62. Un recul « conséquent et rare », souligne le politiste Vincent Tiberj, professeur des universités et chercheur au Centre Emile-Durkheim, coauteur du rapport.

L’indice, en repli pour la deuxième année consécutive, reste malgré tout à un niveau parmi les plus élevés, loin de ceux enregistrés au début des années 1990 et 2010 (autour de 50). Sous l’effet de trois évolutions démographiques – l’élévation du niveau de diplôme, le renouvellement générationnel et la diversification de la population française –, le racisme « biologique », basé sur la conviction qu’il existe des races supérieures à d’autres, est devenu marginal. Une écrasante majorité de Français sont aujourd’hui prompts à condamner les discriminations et 79 % considèrent qu’une « lutte vigoureuse contre le racisme est nécessaire en France ».

« Bruit politico-médiatique » « Une majorité de citoyens restent ouverts, insiste M. Tiberj. Ouverts à la diversité, à l’immigration, capables de faire la distinction entre critique de l’islam et préjugés antimusulmans, mais beaucoup ne votent pas, tandis que les plus radicaux de droite, eux, se déplacent aux urnes. » Ainsi 54 % des sympathisants du Rassemblement national (RN) et 26 % des sympathisants Les Républicains se disent racistes. Et leur contingent grossit, tandis que l’image du parti d’extrême droite s’est améliorée auprès des Français. Selon le baromètre annuel sur l’image du RN, publié par Le Monde et Franceinfo en décembre 2023, 41 % des Français pensent que le RN représente un danger pour la démocratie, soit le niveau le plus faible depuis 1984.

Son succès électoral se nourrit aujourd’hui d’une xénophobie à plusieurs visages qui place l’immigré au cœur de toutes les intolérances. Au-delà des anciens stéréotypes, elle est également économique et sociale. « Dans un contexte de dégradation des services publics, notamment de santé, il y a le sentiment que les immigrés captent une partie des moyens alloués à la protection sociale », ajoute Emmanuel Rivière, spécialiste de l’opinion et enseignant à Sciences Po. A cela s’ajoute « le lien effectué par nombre de Français entre insécurité et immigration, explique Laurence de Nervaux, directrice exécutive du think tank Destin commun. Et enfin, il y a une tension autour de la question de l’islam et de son rapport aux valeurs de la République, notamment les droits des femmes et la laïcité ».

C’est « la dimension culturelle et identitaire » du racisme, s’entourant de justifications comme « l’incapacité supposée des immigrés et des étrangers à se conformer aux normes et aux valeurs de la République », selon la CNCDH. « Débats autour de la loi “immigration”, de la loi sur le séparatisme, des émeutes [après la mort de Nahel en juin 2023], de Crépol [village de la Drôme où Thomas, 16 ans, est mort après avoir été poignardé lors d’un bal, en novembre 2023]… La baisse de la tolérance raconte quelque chose du bruit politico-médiatique et de son impact sur les Français, ajoute Vincent Tiberj. Les forces de long terme, qui banalisent et acceptent la diversité, ont été percutées par les forces de court terme, qui placent les questions identitaires au centre des discours. » L’étude de la CNCDH met en lumière la perméabilité des Français à ce contexte.

Réalisé à l’automne 2023, le baromètre de la CNCDH établit que 51 % des Français considèrent qu’« aujourd’hui en France, on ne sent plus chez soi » (en hausse de 8 points par rapport au printemps 2022), tandis que 56 % approuvent l’idée qu’« il y a trop d’immigrés en France » (+ 7 points par rapport à novembre 2022). De même, 43 % des personnes interrogées pensent que « les enfants d’immigrés nés en France ne sont pas vraiment français », contre 21,4 % en novembre 2022. Ils continuent par ailleurs d’être 60 % à penser que « de nombreux immigrés viennent en France uniquement pour profiter de la protection sociale ».

« Un signal inquiétant » Le sondage, qui mesure également les indices de tolérance par minorités, fait état d’un recul général : 77 à l’égard des Noirs, contre 78 en 2022 ; 57 à l’égard des musulmans, contre 59 en 2022 ; 42 à l’égard des Roms, contre 45 en 2022. C’est la communauté juive qui subit la plus forte chute, passant de 72 en 2022 à 68 cette année. Cette résurgence des haines se traduit en partie dans les actes. « L’année 2023 a été marquée, après le 7 octobre [date de l’attaque terroriste du Hamas en Israël], par un nombre d’actes antisémites exceptionnellement élevé, qui rappelle de manière brutale la persistance de l’antisémitisme dans notre pays », souligne Jean-Marie Burguburu, le président de la CNCDH, dans son éditorial.

« La question, parmi les sept posées sur ce sujet, qui explique cette baisse exceptionnelle est celle qui porte sur la double allégeance des juifs qui seraient plus attachés à Israël qu’à la France », note Nonna Mayer, chercheuse en science politique au Centre d’études européennes de Sciences Po et directrice de recherche émérite au CNRS, coautrice du rapport.

En effet, 42,1 % des personnes interrogées estiment que « pour les Français juifs, Israël compte plus que la France », soit une augmentation de près de 7 points. « On note une hausse similaire par le passé, notamment en 2014, lors de l’opération “Bordure protectrice” [guerre de cinquante jours opposant Israël au Hamas] », rappelle la chercheuse.

Malgré l’émergence d’un « nouvel antisémitisme » chez les musulmans et une partie de l’extrême gauche « qui s’appuierait sur un antisionisme amalgamant et diabolisant “juifs”, “Israéliens” et “sionistes” », les résultats du baromètre tendent à montrer que les opinions antisémites restent largement structurées par les vieux stéréotypes parmi l’ensemble des sondés.

Ainsi, 37 % des personnes interrogées – un pourcentage relativement stable – pensent que « les juifs ont un rapport particulier à l’argent » et 21 % – en hausse de 3 points – partagent l’idée selon laquelle « les juifs ont trop de pouvoir en France ».

Les sympathisants d’extrême droite restent plus enclins à être d’accord avec ces préjugés antisémites traditionnels (51 %), devant ceux d’extrême gauche (36 %) mais derrière les musulmans (60 %). « Quels que soient l’origine de la personne et son positionnement politique, le faible niveau de diplôme, l’insécurité économique, un âge élevé sont les facteurs-clés de l’antisémitisme… comme du racisme », commente Mme Mayer. « Dans ces temps très troublés, que le gouvernement fasse la sourde oreille malgré nos multiples relances envoie un signal inquiétant, se désole la secrétaire générale de la CNCDH, Magali Lafourcade. Notre rapport, qui analyse également les statistiques concernant le traitement judiciaire des affaires de racisme, confirme le désintérêt et le désengagement de l’Etat sur le sujet. » Les parquets ont orienté 17 % d’affaires à caractère raciste en moins que l’année précédente et mis en cause 16 % de personnes en moins pour des infractions à caractère raciste.

« Certaines digues ont sauté. Elles vont être dures à reconstruire. Est-ce que cette baisse de la tolérance est une baisse sans lendemain ou est-ce le début d’un mouvement plus large ?, s’interroge Vincent Tiberj. On ne sait pas. »

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submitted 4 months ago by Klaq@jlai.lu to c/france@jlai.lu

TLDR ; oui mais c'est compliqué.

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Ne pas bouder les bonnes nouvelles, même si tardives.

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Plein de choses intéressantes dans ce rapport.

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« Quand vous entendez dire du mal des juifs, dressez l’oreille, on parle de vous. » Ce sont les mots que Frantz Fanon, psychiatre martiniquais et français, penseur du racisme antinoir, avait entendus de son professeur de philosophie, également d’origine antillaise, et qu’il rapporta dans son livre Peau noire, masques blancs (1952). Fanon raconte qu’il avait d’abord compris cette phrase d’une manière abstraite, au sens de la fraternité universelle. Mais il comprit plus tard qu’il s’agissait d’une alerte très concrète : « Un antisémite est forcément négrophobe », observait-il. Quelques décennies plus tôt, l’itinéraire de l’écrivain notoirement antisémite Louis-Ferdinand Céline avait commencé par un séjour au Cameroun dont le récit donna lieu à un racisme antinoir d’une rare brutalité, déniant toute conscience de soi aux « nègres », « négresses » et « négrillons » qu’il avait fait travailler comme porteurs dans ses entreprises prédatrices dans la forêt équatoriale.

Un négrophobe est logiquement antisémite. Au début des années 1970, le Front national (futur Rassemblement national) naît comme une mobilisation raciste issue de deux mouvements convergents : les nostalgiques antisémites du nazisme et de la collaboration, et les partisans de l’Algérie française. Mobilisés contre les Algériens tous indifféremment désignés « musulmans ».

Ce terme, en reprenant le langage colonial, qualifiait les Algériens en général – même ceux de religion catholique – ce qui donna l’étrange identification de « musulmans catholiques ». Cette signification revient aujourd’hui, par exemple avec l’expression « musulman d’apparence » utilisée par Nicolas Sarkozy en 2012 en se référant au seul faciès.

Ancrage des migrations dans toutes les sociétés

Dès les années 1980, le Front national a converti son idéologie raciste en prenant comme cheval de bataille politique les immigrés postcoloniaux (maghrébins et subsahariens), devenus depuis la fin des années 1990 les « migrants ». La boucle est bouclée : le racisme antijuif, antinoir et antimusulman est le moteur de l’extrême droite d’hier à aujourd’hui. Et le thème de la migration, présenté par le Rassemblement national comme un problème urgent de sécurité et d’identité pour tous les Français et leur territoire, masque une infrapensée raciste réactivée face à la circulation des personnes issues des pays anciennement colonisés.

Les faits eux-mêmes, ceux qui concernent la mondialisation humaine et plus précisément la circulation des personnes à l’échelle de la planète, parlent d’une réalité bien plus grande et ordinaire que tous les fantasmes véhiculés à leur propos. La part relative de la France dans l’arrivée des migrants et réfugiés est plutôt en dessous des moyennes européennes. Et le lien systématique entre la migration et l’insécurité n’est pas prouvé par les données statistiques.

Depuis 2018, les nombreuses recherches produites par l’Institut Convergences Migrations décrivent l’ancrage des migrations internationales dans toutes les sociétés, de départ, de transit et d’arrivée, les transformations sociales et culturelles que vivent les personnes en migration et celles qui les accueillent, mais aussi l’ampleur des violences vécues par les personnes issues de pays du Sud face aux politiques hostiles de la plupart des Etats européens. Seule la mobilisation des sociétés civiles locales permet d’offrir un peu de répit et de soin.

Dans ce moment où nous avons la main pour choisir notre futur gouvernement, il est important de se souvenir du « deux poids, deux mesures » des politiques et discours des gouvernements français et européens en faveur de l’accueil des Ukrainiens, et des réticences voire de la franche hostilité des mêmes, face aux personnes fuyant l’Afghanistan, le Moyen-Orient ou l’Afrique subsaharienne.

Des responsables politiques, même de droite, ont pu défendre l’hospitalité des réfugiés ukrainiens parce qu’« ils [leur] ressemblent », déclara l’un d’eux. La France a pu accueillir 100 000 réfugiés ukrainiens et l’Europe 5 millions, sans que cela provoque le moindre campement de rue, sans polémique, sans accusation des associations pour « délit de solidarité », mais au contraire en mobilisant « d’en haut » le tissu associatif et les citoyens solidaires. Pour les autres, comme on sait, on retrouve le même langage depuis les années 2000, fait de la peur de l’« invasion » et du « remplacement » de population, comme si se rejouait la scène identitaire des « autres » aux airs de barbares.

Regarder autour de soi Que répondre ? On peut dire et répéter, bien sûr, que ces pseudo-descriptions implicitement racistes de la migration sont en contradiction avec les réalités du monde d’aujourd’hui. On peut expliquer que la « crise migratoire » est une crise de l’accueil, et que des choix politiques clairs (régularisation des travailleurs sans papiers, mise à l’abri et accès au travail et aux soins des personnes en situation précaire) auraient un effet immédiat de pacification sociale.

Mais on peut aussi inviter tout le monde à se faire un peu anthropologue, en regardant autour de soi, dans sa vie quotidienne, dans son travail, son bourg ou son quartier, la couleur de peau brune, noire, ou jaune, ou l’origine non française, des amis et voisins. Il est rare, pour ne pas dire exceptionnel, que chaque Français n’ait pas dans sa propre généalogie (ascendants, descendants, collatéraux et conjoints) des personnes à la couleur de peau, à l’accent ou au nom « qui ne font pas français ». Il est rare que cette altérité proche n’ait pas quelque chose à voir avec le passé colonial de la France, en Afrique, Asie, Océanie, au Proche-Orient ou aux Antilles.

En regardant ainsi autour de soi, on pourra entrevoir combien de personnes – et quelles personnes – seraient supprimées de notre vie commune si l’on appliquait le principe défendu par François-Xavier Bellamy, député européen de droite, voulant faire aussi bien que l’extrême droite et déclarant dans un débat télévisé [le 24 mai 2023 dans « C ce soir », sur France 5] que les immigrés de la première, de la deuxième et même de la troisième génération n’ont pas leur place dans notre communauté nationale.

Que l’on regarde, que l’on compte autour de soi, cela met en danger plus du tiers de la population française. Ce n’est donc pas la question de la migration qui inquiète l’extrême droite et la droite derrière elle. C’est la part d’étrangeté que chacun a en soi, chaque personne et tout le pays. Reconnaître cette part est la meilleure réponse à toute politique fondée sur la peur des autres.

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submitted 4 months ago* (last edited 4 months ago) by Klaq@jlai.lu to c/france@jlai.lu

Décédé brutalement du sida en juin 1984, Michel Foucault l'un des intellectuels les plus lus et commentés dans le monde. Mais loin du penseur dans sa tour d'ivoire, le philosophe fut également un homme engagé, bien ancré dans son siècle. Du mai 68 tunisien jusqu'au prestigieux Collège de France, des parvis des prisons françaises jusqu'au soleil de la Californie psychédélique des années 70, retour sur la vie et l'oeuvre de Foucault, marquée par des métamorphoses successives, à travers la puissance d'évocation de l'archive et grâce au pouvoir de transfiguration de l'animation.

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« Pour nous, la victoire du Rassemblement national [RN], c’est tout sauf une surprise », confie Yvon Le Flohic, médecin généraliste dans un cabinet médical de Ploufragan, dans l’agglomération de Saint-Brieuc. Un morceau de France ordinaire, où le revenu annuel moyen était de 23 010 euros en 2021, presque identique à la moyenne nationale (23 160 euros). En 2020, on y comptait un quart de retraités. Parmi les personnes en activité, 20 % d’ouvriers, 30 % d’employés, 30 % de professions intermédiaires et 13 % de cadres ou professions supérieures. Le tout, au cœur d’une Bretagne historiquement imperméable aux extrêmes, affectée ni par la désindustrialisation, ni par le chômage ou l’insécurité.

Pourtant, le 9 juin au soir, la liste de Jordan Bardella est arrivée en tête aux élections européennes dans les Côtes-d’Armor, avec 28,21 % des suffrages (27,11 % à Ploufragan). En 2019, Renaissance était en tête, et Marine Le Pen obtenait 19 % des voix. « Dans notre cabinet, on voit défiler tout le monde, poursuit le médecin. Nous étions sûrs du résultat. Ici, les gens ont la sensation de ne plus être pris en compte, de ne pas être représentés, ils ne croient plus aux institutions. Et cela ne date pas d’hier. »

A l’échelle du pays, ces classes moyennes ont exprimé ce ressentiment le 9 juin, lors des élections européennes, certains par l’abstention, et beaucoup d’autres en votant en faveur du RN, traditionnellement plutôt ancré dans les milieux populaires. Selon l’analyse réalisée par OpinionWay, 41 % des ménages gagnant entre 1 000 et 2 000 euros par mois ont voté pour Jordan Bardella, et 33 % de ceux aux revenus compris entre 2 000 et 3 500 euros. Une percée sociologique : parmi les employés, le RN a gagné dix points entre 2019 et 2024, et quinze points parmi les professions intermédiaires.

De plein fouet

A ce malaise s’est ajouté un ouragan appelé inflation, qui a fait vaciller les modes de vie et les certitudes. « On n’avait pas vu une telle hausse des prix depuis quarante ans, et à l’époque, tous les salaires étaient indexés sur les prix, rappelle Mathieu Plane, directeur adjoint du département analyses et prévisions à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). C’est la première fois qu’on vit une telle crise inflationniste sans cette protection. »

Prises de plein fouet par la flambée des produits de base – l’alimentaire a connu une hausse de 20 % en deux ans, l’électricité de 70 % en cinq ans –, exclues des dispositifs d’aide destinés aux plus modestes, les classes moyennes ont vu leurs habitudes et leurs modes de consommation bouleversés, comme le raconte Elisabeth (elle a préféré garder l’anonymat), 56 ans, installée sur la côte varoise : « Depuis plusieurs années, j’ai pris l’habitude de compter chaque euro lors de mes courses, et je me suis rendu compte que je n’étais pas la seule. Je vois aussi des hommes parcourir les rayons la calculette en main. Et ce n’est pas tout. Chaque dépense est planifiée, je ne peux plus partir en vacances, ni épargner. »

Les « périurbains » et les ruraux ont été plus pénalisés que les autres. On comptait, au plus fort de la crise, trois points d’écart dans la hausse moyenne du coût de la vie entre eux et ceux vivant dans les centres-villes, selon l’OFCE. Certes, les loyers sont plus élevés dans les métropoles, mais les périurbains ou les ruraux sont bien plus tributaires de leur voiture au quotidien et dépensent davantage en chauffage pour leur logement, souvent une maison individuelle.

Sous pression, les ménages ont du mal à boucler leurs fins de mois, une fois payées les charges fixes, l’électricité, le carburant, les assurances, et l’alimentation, et encore, en supprimant souvent les produits les plus coûteux. « Aujourd’hui, je ne vais plus au restaurant, à peine au cinéma, encore moins à l’opéra. Je voyage en rêve, je suis à découvert le 15 du mois, je paie mon garagiste en trois fois, et j’achète mes vêtements en seconde main », résume Anne, 50 ans, professeure certifiée à temps partiel et un enfant à charge.

Des dettes impossibles à apurer

Pour certains, la crise inflationniste s’est traduite par des dettes impossibles à apurer. « On voit arriver des gens qui n’auraient jamais passé notre porte avant, confirme Laetitia Vigneron, conseillère financière à l’Union des associations familiales (UDAF) du Cher. Des personnes qui travaillent, qui ont des crédits immobiliers ou des crédits voiture. » Entre janvier et mai, le nombre de dossiers de surendettement déposés auprès de la Banque de France a augmenté de 6 % par rapport à 2023. « Le prix des courses a explosé. Les gens n’arrivent plus à s’en sortir. On voit des dossiers de surendettement constitués uniquement de dettes de charges courantes : loyers, assurances, électricité », renchérit Céline Rascagnères, également conseillère financière pour l’UDAF, dans l’Aude.

Pour ces personnes ni riches ni pauvres, la dégringolade ne se fait pas ressentir uniquement dans le train de vie. Elle est aussi symbolique. « Dans ma tête, un prof faisait partie des classes moyennes supérieures, il pouvait s’offrir deux-trois restos mensuels, des voyages pour le plaisir, des loisirs pour se cultiver, une petite maison pour la retraite et de l’argent pour les enfants, explique Anne, la professeure. Je suis déclassée. » Un sentiment partagé par bon nombre de ses semblables.

Audrey, une Parisienne de 44 ans, éducatrice spécialisée, gagne 2 100 euros par mois (salaire, prime et pension alimentaire), pour la faire vivre avec son fils : « Le déclassement social, je le vis de la façon suivante : un salaire insuffisant au regard de mes études et de mes responsabilités professionnelles ; le fait de ne pas avoir les moyens de scolariser mon fils dans le privé ; deux semaines de vacances seulement pour moi et une colonie de vacances, en partie financée par la ville, pour mon fils ; la perte de la valeur travail et l’absence d’ascenseur social. »

Michel, un retraité de 69 ans, est en colère : déposé en février 2024, le dossier de retraite de son épouse, atteinte d’une maladie neurologique, est toujours à l’étude. « En attendant, nous sommes confrontés à des problèmes financiers et à des problèmes de santé, mais nous n’avons aucune aide, car l’on considère que l’on gagne trop ! A ce jour, nous ne faisons qu’un repas sur deux, en mangeant des pâtes et des œufs, et encore, pas toujours. Quel plaisir d’avoir cotisé cinquante-deux ans pour en arriver là ! »

Précarité nouvelle

Le sentiment de déclassement s’exprime aussi au travers du regard d’autrui. Installée à Nantes, Catherine, bac + 5, est chargée de communication indépendante, avec des revenus autour de 2 500 euros par mois, « sans aucune perspective de progression ». Elle travaille chez elle, réfléchit depuis deux ans à changer sa voiture sans pouvoir franchir le pas, et ses dernières vacances se résument à une semaine à l’été 2023 dans un village éloigné du Limousin. Mais c’est face à sa fille que la conscience de sa précarité nouvelle la taraude le plus. « L’autre jour, elle a voulu que je lui achète un pull à 90 euros, à la mode chez ses copines. J’ai dit non. Elle s’est exclamée : “Mais, maman, on est pauvres ?” »

Anne, Audrey et Catherine incarnent la fragilisation financière des familles monoparentales, essentiellement des mères célibataires. Un tiers des pensions alimentaires reste impayé, et le taux de pauvreté dans leurs rangs atteint 32,3 %, contre 14,5 % pour l’ensemble de la population, selon des données de la Caisse d’allocations familiales ou de l’Institut national de la statistique et des études économiques. Faut-il y voir un lien ? Parallèlement, le vote RN a progressé de manière spectaculaire chez les femmes : dix points entre 2019 et 2024, contre trois seulement chez les hommes, indique Ipsos. « Tenant à distance l’héritage viriliste et sexiste de son père, Marine Le Pen se présente comme une femme moderne, mère de famille, divorcée, travaillant, affichant sa “sensibilité à la cause féminine” », rappelait la philosophe Camille Froidevaux-Metterie dans une tribune du Monde du 13 juin.

Le sentiment de déclassement se voit parfois dans le regard des enfants, mais se mesure toujours par rapport à la génération précédente. « Moins bien que mes parents », déplore Tim, ingénieur dans la fonction publique, quand il parle de l’appartement de 68 mètres carrés qu’il a « difficilement » pu acquérir à Grenoble avec le fruit de son travail. Et il craint que sa propre descendance ne vive la même mésaventure. « Malgré une vie peu dépensière, je peine à épargner et à financer pour mes enfants des études équivalentes à celles que j’ai pu suivre, enchaîne-t-il. En somme, je vis moins bien que mes parents, et la dynamique est à la dégradation. »

« L’absence de perspectives, la difficulté de dessiner une trajectoire ascendante » font partie des désillusions des classes moyennes, souligne Nicolas Duvoux, sociologue à l’université Paris-VII, qui évoque l’érosion des « possibilités de vie ». Une érosion qui va en s’accentuant, s’inquiète le chercheur. « La précarité sur le marché du travail est devenue la norme, explique-t-il, particulièrement pour les jeunes. Or, la précarité dans l’emploi se traduit par l’impossibilité de construire sa vie de manière durable. Cela ronge le corps social. »

En vain

Confrontés à cette précarisation, les jeunes se sentent en outre comme rejetés des villes où ils ont parfois grandi, et souhaiteraient vivre. A 35 ans, Antoine, Bordelais, salarié dans l’associatif, voudrait acheter un 40 mètres carrés dans sa ville : « Impensable avec un smic seul. » Parisiens, Patrick et son épouse, deux enfants, cherchent à s’agrandir. En vain. « Impossible pour nous, couple d’ingénieurs, d’avoir plus de trois pièces. Même les logements sociaux auxquels nous avons droit sont au-dessus de notre budget. Nous voilà moins bien lotis qu’un ouvrier des années 1960 », tranche l’homme de 35 ans. Le problème est encore aggravé dans les régions très touristiques, où les résidences secondaires et autres meublés assèchent le marché pour les locaux, contraints d’aller habiter loin de leur travail – et d’avoir une voiture, qui plombe définitivement le budget.

Au fond, les classes moyennes « ont une vision ternaire de la société, décrypte le politologue Jérôme Fourquet : « Pour eux, il y a en bas les plus pauvres, les assistés, et au-dessus les riches qui se gavent. Ils ont le sentiment d’être trop riches pour être aidés, trop pauvres pour s’en sortir, et d’être taxés pour financer un modèle social auquel ils n’ont plus accès. Le pacte social implicite, qui est de payer ses impôts mais, en retour, d’en avoir pour son argent, est rompu. »

Or la gauche, elle, oppose aujourd’hui une vision « binaire », estime M. Fourquet, qui repose sur l’idée du peuple contre les élites – un schéma dans lequel les catégories intermédiaires ne se retrouvent pas : « Le RN, en faisant par exemple de la voiture un thème politique, a réussi à créer une proximité avec les classes moyennes, qui se sentent enfin prises en compte. »

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FRANCE - REPORTAGE

À Clichy-sous-Bois, vingt ans de mobilisation pour rien ?

21 juin 2024 | Par Faïza Zerouala

La commune de Seine-Saint-Denis est une ville quadrillée par les militants pour inciter la population à se rendre aux urnes. Ces élections législatives ne feront pas exception. Pourtant, la résignation règne et il est difficile de mobiliser face au risque du Rassemblement national.

Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis).– Longtemps infatigable, moteur de tous les combats pour convaincre Clichy-sous-Bois de voter, Mohamed Mechmache, 58 ans, commence cette fois à s’épuiser. Dans la ville, l’ancien éducateur croise des connaissances qui l’alpaguent toujours un peu sur le même ton. « Qu’est-ce que tu fais encore ? T’en n’as pas marre de te casser la tête pour une énième campagne ? Ça fait vingt ans. » Malgré tout, il va repartir au combat avec ses camarades du collectif Aclefeu (Association collectif liberté égalité fraternité ensemble unis).

Un collectif né il y a presque vingt ans, dans le sillage des révoltes de l’automne causées par la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré le 27 octobre 2005. À l’époque, Mohamed Mechmache et quelques autres ont voulu transformer ces braises en autre chose, en tentant de lancer un élan électoral pour peser. Ces derniers jours, Aclefeu a publié une tribune pour rappeler ses fondamentaux : « La voix des quartiers compte » et, surtout, ces mêmes quartiers ne sont pas un « désert politique ».

Dans la ville, sur les panneaux métalliques électoraux, les affiches des candidat·es apparaissent si délavées qu’on peine à croire qu’un scrutin s’est déroulé seulement quatre jours plus tôt. Jeudi 13 juin, une autre compétition aimante les esprits. La CAN des quartiers, organisée ici depuis trois ans, attire toute la ville pour soutenir ses équipes de foot dans une ambiance festive. 

Ce soir-là, le Mali affronte le Sénégal sous les applaudissements de la foule serrée sur les gradins du stade Henri-Barbusse, enfumés par les stands de sandwichs-merguez. Les visages sont jeunes. D’autres sont là en famille, poussettes incluses.

Le 9 juin, Adama, 40 ans, a séché les urnes. Ce restaurateur a une explication à cette désertion. « La France, c’est déjà loin, et l’Europe, c’est encore plus loin. » Sa manière à lui d’expliquer qu’il ne comprend pas l’enjeu des européennes et surtout cette fracture qui ne se résorbe pas entre le pays et les quartiers populaires. Ce qui lui fait dire que Clichy-sous-Bois est un « monde à part ».

L’abstention en tête

En tout cas, c’est une ville-laboratoire intéressante à observer pour comprendre certains ressorts électoraux, peu fidèles aux résultats nationaux. En effet, la liste LFI arrive en tête du scrutin européen avec 54 %. Le RN récolte un peu moins de 16 %. Quant au parti présidentiel, il s’effondre à 6,5 %. L’abstention reste la quatrième actrice de l’équation. Affiché sur la mairie, le taux est vertigineux : 71 % des habitant·es ne se sont pas déplacé·es. Ce résultat, l’un des records du département, interpelle dans une ville qu’un tissu associatif vigoureux laboure pour encourager sa population à donner de la voix.

Aclefeu en tête. En 2007, le collectif mobilise contre Nicolas Sarkozy. Cinq ans plus tard, il investit un hôtel pour abriter son ministère de la crise et des banlieues et interpeller les candidat·es à la présidentielle sur les sujets concernant les quartiers populaires. Et aussi en dehors des échéances électorales, à travers le collectif « Pas sans nous » dans lequel Mohamed Mechmache et Mehdi Bigaderne, adjoint et cofondateur d’Aclefeu, sont largement impliqués. Sans oublier les tournées un peu partout en France.

Dans les travées du stade Henri-Barbusse, la compagne de Michel, Allison, 34 ans, auxiliaire de puériculture, partage aussi le sentiment d’être mise de côté « par tous les partis » : « On fait un peu tache. » Elle aimerait que les politiques se rendent compte de « l’apport de [leurs] votes ». Le pays est « fatigué », elle trouve le climat anxiogène.

De ce que j’entends autour de moi, ça ne sert à rien de voter.

Sarah, 33 ans

La mère de famille culpabilise de n’avoir pas voté aux européennes, pour des raisons professionnelles. Elle « va rattraper [s]a bêtise », assure-t-elle, en votant pour les législatives. L’essentiel étant d’éviter la « catastrophe du RN ». D’origine antillaise, elle se sent vulnérable et craint pour sa fille.

Un peu plus loin, Sarah, 33 ans, est loin de ces inquiétudes. Elle serre sa petite contre elle. Cette secrétaire devenue mère au foyer – elle a quatre enfants de 9 mois à 7 ans – n’était pas au courant de la tenue des élections européennes. Pas plus qu’elle n’a suivi les rebondissements électoraux post-dissolution. La trentenaire n’a pas le temps de s’intéresser à la politique. « De ce que j’entends autour de moi, ça ne sert à rien de voter. »

Mohamed Mechmache, candidat sans étiquette malheureux aux législatives de 2012, a entendu ce discours plus que de raison ces deux dernières décennies. Le mot « défiance » revient sans cesse dans sa bouche, d’abord « vis-à-vis des politiques menées ces vingt dernières années » qui n’ont pas amélioré ou si peu la vie des habitant·es, selon plusieurs personnes rencontrées sur place.

Une pauvreté qui perdure

Pourtant, le tramway T4 tant espéré est arrivé, les programmes de rénovation urbaine du Chêne-Pointu ont été lancés, un commissariat, un centre de santé, une agence France Travail ont enfin ouvert au fil des ans. Mais Adama, le restaurateur, est encore plus sévère sur les changements de la ville. La rénovation urbaine entreprise n’est que « du maquillage », selon lui. Pire, un « cache-misère » dans tous les sens du terme. Car ici le taux de pauvreté culmine toujours à 42 % dans la ville.

Mehdi Bigaderne, cofondateur d’Aclefeu, deuxième adjoint à la mairie de Clichy-sous-Bois depuis 2008, n’est pas surpris de l’abstention aux européennes. « On a été au rendez-vous de chaque mobilisation. On a tiré l’alarme sur plein de problématiques en disant, attention, ce qui se passe dans les banlieues va faire boule de neige. Aujourd’hui, l’abstentionnisme est un problème pour la France entière. »

L’élu a participé, « avec [s]a casquette de militant associatif », à la préparation d’un spot de mobilisation avec la parole des habitant·es, « des jeunes et des moins jeunes ». Il n’oublie pas non plus qu’il faut rappeler aux électeurs et électrices, « pour ceux qui vont partir et qui ont déjà pris leurs billets », les modalités des procurations.

Mais ce travail a des limites. « On fait un travail sur la citoyenneté avec un grand C, sur la mobilisation autour des scrutins. Mais aussi sur la justice sociale ou l’accès aux droits. Mais on n’est pas aidés, les inégalités explosent. Ici les gens veulent surtout réussir à remplir leur frigo », soupire Mehdi Bigaderne. Et le « plan Marshall des banlieues » tant promis n’est jamais venu.

Abdelali Meziane, conseiller municipal d’opposition écologiste, candidat d’une liste citoyenne aux dernières municipales, est lui aussi prêt au combat, avec les élu·es et militant·es associatifs de la ville. Son cœur penche en faveur du Nouveau Front populaire. Il compte arpenter le marché, les lieux de passage, les écoles. Ce week-end aura lieu la fête de la ville, propice aux rencontres. « On va essayer de capitaliser là-dessus. »

Mais convaincre simplement d’aller voter relève parfois de la gageure. « L’individualisme » prime, les habitant·es s’investissent moins. Beaucoup vivent dans des conditions matérielles difficiles, « les gens sont dans la survie », tempère-t-il. Alors Abdelali Meziane répète que les droits acquis, les libertés individuelles et la lutte contre les discriminations ne seraient plus garantis avec le RN. « Ça va être pire. »

Une absence de représentation

Ayoub, 24 ans, étudiant en droit, anciennement impliqué dans la politique locale, est tiraillé entre sa compréhension de cette abstention persistante et sa propre crainte d’une extrême droite victorieuse. Le jeune homme entend la défiance des Clichois·es à l’égard du vote. La rhétorique du barrage à l’extrême droite passe de moins en moins. En cause, selon lui, « un manque de culture politique » avec la difficulté de faire comprendre les bienfaits du vote comme outil.

La peur ne mobilise plus, constate-t-il. « Ils vont être inquiets de quoi ici ?, s’interroge l’étudiant. Ça fait vingt ans qu’on leur dit qu’on qualifie les personnes issues de l’immigration comme des non-Français. Le glissement n’en finit pas. »

« Comment expliquer aux gens d’aller voter alors qu’on a Darmanin au ministère de l’intérieur ? », confirme Nawufal Mohammed, vidéaste de 34 ans. Malgré son cursus en science politique, il n’arrive plus à trouver du sens à cette discipline. Et de citer pêle-mêle la loi immigration, le policier qui a tué Nahel et qui a bénéficié d’une cagnotte de soutien, l’affaire Théo avec des peines de sursis prononcées à l’égard des trois policiers qui l’ont gravement blessé.

La sociologue Marie-Hélène Bacqué, qui a codirigé une recherche participative avec des jeunes dans dix quartiers populaires en Île-de-France, confirme que l’éloignement des populations des quartiers vis-à-vis de la représentation électorale perdure en particulier parce qu’elles ne se sentent pas représentées. Et ce, malgré une légère hausse de la participation dans les quartiers populaires franciliens par rapport aux précédentes élections européennes.

« La représentation des quartiers populaires, des classes populaires et des populations racisées, reste quand même très faible dans les choix des candidats même si on observe une évolution, analyse-t-elle. Mais surtout, les collectifs et mouvements sociaux émanant de ces quartiers n’ont pas été conviés à la table de négociation et les choix de candidats ont été faits sans eux. D’où le sentiment de ne pas être pris au sérieux, d’être vu seulement comme un réservoir de voix. »

Écumer les cages d’escalier

Adama, présent à la CAN des quartiers, partage ce constat et ne se sent pas représenté, ni même pris en considération : « Depuis Chirac, on fait des barrages et une fois au pouvoir, les partis font n’importe quoi comme les lois immigration ou la déchéance de nationalité. Il ne faut pas s’étonner qu’on emprunte le chemin d’extrême droite. »

Son ami Michel abonde : « Tous les partis se ressemblent. » Il est même parfois tenté de voir la France basculer, elle qui tente le diable depuis tant d’années. « Qu’on y aille, on va bien souffrir et on passe à autre chose ensuite. » « Pas sûr », rétorque Adama.

Sans compter qu’un tabou a sauté, rappelle Abdelali Meziane. Le vote RN ne s’exerce plus dans le secret de l’isoloir, même ici dans cette ville où une partie de la population est pauvre et issue de l’immigration. « Ça ne fait plus peur. Certains souhaitent même que le RN l’emporte pour rétablir l’ordre et la sécurité. Ils tiennent un discours sociétal très dur. Avec cette logique du “on n’a jamais essayé”, sur un mode presque révolutionnaire. »

Difficile donc de prévoir si la rhétorique du barrage va parvenir à mobiliser, prévient encore la sociologue Marie-Hélène Bacqué. « Outre la question de la représentation, le programme reste un enjeu, sur les questions sociales mais aussi les enjeux de discrimination. Et enfin, outre les réseaux sociaux qui jouent un rôle important, il faut remobiliser les méthodes habituelles de militantisme de quartier qui ont fait leurs preuves comme le porte-à-porte ou même les réunions d’appartements. » Mais tout dépendra des forces prêtes et capables d’écumer les cages d’escalier.

Mohamed Mechmache a profité de la CAN des quartiers pour aller voir les jeunes et discuter avec eux. De son côté, Ayoub utilise Snapchat et Instagram pour sensibiliser dans son entourage et parmi ses connaissances. Le jeune homme répond aux interrogations, assez nombreuses, comme il peut. L’avènement de TikTok comme canal de mobilisation est intéressant à ses yeux, même s’il en perçoit les limites. « Malheureusement, ça reste de l’information fast-food. »

Il demeure réaliste, car il connaît par cœur son territoire. « On ne va pas passer de 70 % d’abstention à 30 %. Même s’il y a un petit sursaut, il restera léger. » Mais le tumulte et les rebondissements de la vie politique de ces dix derniers jours donnent de l’espoir à Abdelali Meziane, alors pourquoi pas un « miracle » ? Sous la forme de jeunes abstentionnistes qui se déplaceraient aux urnes, parce qu’un footballeur ou un chanteur leur aura dit de voter contre le Rassemblement national. « Dans les dernières heures, il peut y avoir un raz-de-marée… » Croire aux miracles pourrait être le mantra de ces militants acharnés de la participation.

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submitted 4 months ago by Klaq@jlai.lu to c/france@jlai.lu
[-] Klaq@jlai.lu 10 points 4 months ago* (last edited 4 months ago)

Bonne tribune, pour le timing je sais pas. Je sais pas si Alimi et Lemire souhaitent affaiblir le NFP ou pas. Ce qui est sûr c'est qu'est visé ici LFI, l'oeillade prononcée avec le rappel du vote Place Publique veut tout dire à ce niveau.

L'antisémitisme de gauche n'est pas une création centriste. Il existe et il est historiquement attesté. Ce qui n'empêche pas qu'il soit mobilisé comme élément de langage par l'extrême droite pour nier sa propre haine. Ce qui n'empêche pas non plus qu'il est utilisé par Macron pour renvoyer dos à dos le NFP et le RN, en se présentant comme le choix de la raison.

Publier cette tribune dans cette temporalité, c'est renforcer ces discours aussi, je peine à croire qu'ils n'aient pas imaginé que ça sera aussi ça, leur contribution au débat.

[-] Klaq@jlai.lu 10 points 4 months ago

Le mec a honte, tu vois qu'il assume pas sur la vidéo quand sa femme prend le relai. Il comprend le truc, d'ailleurs il est pas flouté. La femme en revanche, je me demande vraiment comment tu peux changer le comportement de ce type de profil.

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submitted 4 months ago by Klaq@jlai.lu to c/france@jlai.lu

TLDR : la population s'appauvrit, les dépenses sociales augmentent, les collectivités peuvent pas suivre.

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submitted 4 months ago* (last edited 4 months ago) by Klaq@jlai.lu to c/france@jlai.lu

TLDR ; La CFDT appelle à voter contre l'extrême-droite mais pas pour le NFP, contrairement à la CGT.

Cela dit, vu l'emprunt à l'extrême-droite du terme immigrationniste récemment utilisé par Macron, on est en droit de se demander si ce n'est pas un appel déguisé à voter NFP.

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submitted 4 months ago* (last edited 4 months ago) by Klaq@jlai.lu to c/france@jlai.lu

En apportant sa voix à légitimer le Rassemblement national, la figure de l’antinazisme trahit les femmes, les enfants et les hommes qui, grâce à lui, sont présents à notre mémoire, affirment, dans une tribune au « Monde », l’universitaire Michèle Cohen-Halimi, l’écrivain Francis Cohen et le metteur en scène Leopold von Verschuer.

Entre le Nouveau Front populaire (NFP) et le Rassemblement national (RN), monsieur Klarsfeld n’hésitera pas, il donnera sa voix au Rassemblement national qui aurait fait sa « mue ». Suffit-il au Rassemblement national de ne plus se dire antisémite pour ne plus l’être ? A quelle extraordinaire magie de la parole M. Klarsfeld donne-t-il crédit ! Suffit-il, en effet, d’une habileté tactique et rhétorique pour effacer l’histoire et l’idéologie fondatrice d’un parti ?

Pourquoi Serge Klarsfeld, figure de l’antinazisme, se dit prêt à voter RN Qu’est-ce qui assure M. Klarsfeld de l’effectivité de cette mue dans un moment politique et électoral où la tactique impose d’y faire croire ? Faut-il donc penser de manière charitable que M. Klarsfeld s’abandonne à une crédulité désastreuse, quand il ne peut ignorer de quelle mémoire, de quel travail de mémoire, son nom est porteur ? A-t-il donc impunément décidé d’impliquer à lui seul cette mémoire dans son ralliement au Rassemblement national ?

A entendre récemment M. Klarsfeld s’entretenant avec le journaliste Darius Rochebin sur LCI, le RN serait un parti « pro-juif » : « Le Rassemblement national soutient les juifs, soutient l’Etat d’Israël, et il est tout à fait normal, vu l’activité que j’ai eue ces soixante dernières années, qu’entre un parti antisémite et un parti pro-juif je voterai [sic] pour un parti pro-juif.  »

Un parti pro-juif est la figure spéculaire d’un parti antisémite : c’est un parti qui sait qui sont les juifs, un parti qui sait les reconnaître, un parti qui sait où ils sont. C’est un parti qui peut répondre à la question : « Qu’est-ce qu’un juif ? » Et nul n’ignore où a conduit ce discours essentialiste. Un tel parti n’est donc pas nouveau, ce qui est nouveau, en revanche, c’est qu’un tel parti puisse dire qu’il n’est pas antisémite.

Effacement de l’histoire Et Serge Klarsfeld va encore plus loin dans la requalification idéologique du RN, lorsqu’il dit que ce parti est « populiste », ce qui pour lui signifie « populaire » ou, mieux encore, composé de « braves gens », car il court-circuite alors l’histoire pour la dérouler à l’envers et la réécrire en considérant que les « braves gens » du Rassemblement national auraient indubitablement fait partie des « braves gens » qui ont aidé les juifs en France pendant la seconde guerre mondiale : « C’est un parti populaire, populiste, on dit. Ce sont de braves gens et les braves gens pendant la guerre, ce sont ceux qui ont aidé les juifs en France. »

Serge Klarsfeld n’alimente pas la confusion, il l’aggrave et il surenchérit sur l’effacement de l’histoire, qui fait partie du programme idéologique du Rassemblement national.

Les procès pour négationnisme, les poursuites pour délits antisémites ont-ils condamné des femmes et des hommes de gauche ou d’extrême gauche ces dernières années ? Lorsque, le 5 novembre 2023, sur un plateau de BFM-TV, un journaliste demandait à Jordan Bardella si Jean-Marie Le Pen était antisémite, celui-ci répondit : « Je ne sonde pas les cœurs et les reins, mais je ne le crois pas. » M. Klarsfeld, quant à lui, croit Jordan Bardella.

M. Klarsfeld apporte sa voix à une légitimation inespérée du RN, mais sa voix – l’aurait-il oublié ? – fait aussi résonner celles de toutes ces femmes, de tous ces enfants et de tous ces hommes qui, grâce à lui, sont présents à notre mémoire, qu’il trahit désormais. Car il n’est pas douteux que toutes ces femmes, tous ces enfants et tous ces hommes n’avaient pas besoin d’un parti « pro-juif ».

[-] Klaq@jlai.lu 8 points 4 months ago

La bourgeoisie craint tout ce qui empêche son développement ou sa stabilité. C'est pour ça qu'un Piketty, bien que policé, est beaucoup plus subversif et dangereux que n'importe quel trotskyste.

[-] Klaq@jlai.lu 10 points 4 months ago

Parce que le libéralisme n'est pas soluble dans le fascisme mais toujours plus que dans le socialisme.

[-] Klaq@jlai.lu 8 points 4 months ago

Jamais surpris de voir la droite persévérer dans son être.

[-] Klaq@jlai.lu 11 points 4 months ago* (last edited 4 months ago)

Nous sommes en 2146, RN a fini de rassembler la nation et les Le Pen constituent désormais le seul patronyme du peuple français et la mégacaste au pouvoir depuis 100 ans. Depuis, le flux migratoire est conditionné à une assimilation familiale et contraint a passé une épreuve permettant de déterminer génétiquement la compatibilité avec le génome Le Pen afin de préserver la pureté du sang. De plus, une allégeance aux reliques de Marine doit avoir lieu en public, où l'on psalmodie le générique de TPMP, protocole consécutif à la séance de demande de secours à Jeanne.

Une légende raconte qu'un anneau pourrait délivrer les français de cette tyrannie. Cet objet, forgé dans une ZAD le siècle précédent, permettrait de redonner une conscience de classe et de mettre fin au règne consanguin et destructeur des forces lepénistes. L'anneau serait caché dans une mystérieuse grotte, sous la protection malveillante d'une créature semi-humaine, avorton dégénéré d'un croisement scientifique du savant fou D. Raoult entre les créatures mythologiques Zemmour et Hanouna.

[-] Klaq@jlai.lu 9 points 4 months ago* (last edited 4 months ago)

Autant il faudra une rapide clarification des certains membres du nouveau Front Populaire au sujet de l'Ukraine (le principal point faible je pense), autant mettre de la même manière en avant un supposé côté anti-UE (?) et anti-nuke (osef là ça va pas déterminer la stratégie énergétique de la France en 2 ans) suffit à discréditer Rebsamen.

Sinon bien joué la faute dans le titre mamen. Que du sale.

[-] Klaq@jlai.lu 9 points 4 months ago* (last edited 4 months ago)

C'est encore pertinent la théorie du fer à cheval des zekstrèmes à l'heure où Ciotti vient d'ouvertement illustrer l'inverse ?

Il faut minoriser l'électorat bourgeois et le renvoyer à ce qu'il est réellement, des cadres sup urbains hégémoniques qui voient dans la gauche un danger ontologique pour leurs modes de vie privilégiés : ils ont raison d'avoir peur.

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Klaq

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