[-] NuclearPlatypus@jlai.lu 2 points 3 months ago* (last edited 3 months ago)

En août dernier, c'était un ancien commandant de la force Al Qods, unité d'élite de l'IRGC, qui s'était rendu à Paris pour les JO. Cette unité a joué un rôle clé dans la répression des manifestations iraniennes en 2022-2023

https://www.ouest-france.fr/jeux-olympiques/le-president-iranien-du-comite-national-paralympique-2024-vise-par-une-plainte-pour-torture-a-paris-1ce1303e-459f-11ee-a014-fc15152f6424

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submitted 9 months ago by NuclearPlatypus@jlai.lu to c/france@jlai.lu

Réarmer ? Régénérer ? Pour que «la France reste la France» ? Derrière les mots du gouvernement actuel, il y a hélas une logique. On exalte la «communauté» nationale pour mener une politique de classe, hostile à plus de 90 % de la population.


Ce «nouveau monde» situé quelque part entre Thatcher et, désormais, le natalisme des années 20, a un rapport trouble au langage. On a, depuis longtemps, cessé d'écouter, en se disant que ces gens racontent n'importe quoi. Parler, en 2017, de «révolution» quand on s'apprête à mener une politique conservatrice, voire ouvertement réactionnaire (la réaction est le contraire de la révolution), quand on abolit l'ISF tout en baissant les APL ; récidiver, en parlant de «soldats de l'an II» quand on ne se cache même plus d'être de droite, quand on fait alliance avec le Rassemblement national (RN) - c'est dès le soir du second tour des législatives de 2022 qu'Eric Dupond-Moretti avait appelé à travailler ensemble avec les lepénistes, qui ont obtenu, grâce aux macronistes, des vice-présidences à l'Assemblée nationale - ; quand on soutient Gérard Depardieu contre ses victimes ; prétendre être «le camp de la raison» quand on utilise du gaze lacrymogène contre des scientifiques à Saïx (Tarn), quand on ne change pas ce qui ne marche pas (une politique fiscale pour les très riches qui ne produit aucun «ruissellement», par exemple) ; parler de «valeur travail», d'effort et de mérite quand on est millionnaire de naissance (Amélie Oudéa-Castéra) et que l'on n'a jamais sérieusement travaillé de sa vie, c'est effectivement n'importe quoi.

Ces gens ne peuvent pas dire honnêtement ce qu'ils sont et ce qu'ils font, car ils mènent une politique de classe, hostile à plus de 90 % de la population. La nouvelle ministre de l'Education nationale est un cas intéressant : elle a fait un choix de classe et de caste pour ses enfants, en les scolarisant dans un ghetto caricatural de la sécession des riches, par ailleurs ouvertement d'extrême droite.

Comme elle «n'assume» pas (c'est rare), elle ment. Avec une lâcheté exemplaire, elle diffame une enseignante et son école et crache ainsi sur tous les professeurs de ce pays, avant de couvrir un établissement en infraction caractérisée avec la loi et en rupture de contrat avec l'Etat (un établissement musulman à qui on reprocherait les délits de «Stan» ne serait-il pas fermé sans délai pour «communautarisme», «sécessionnisme» et «fanatisme religieux» ?).

Uniformes, redoublements et brevet couperet

Madame Oudéa-Castéra n'est que le symptôme d'une pathologie plus inquiétante. Ces gens ne font pas que mentir («la com»), ils manient des signifiants vides : l'école a des problèmes ? on va rétablir l'autorité (ils n'en ont aucune). Donc : uniformes, redoublements, brevet couperet, bref, tout ce dont la littérature scientifique montre que c'est inefficace (mais le «cercle de la raison» n'a que faire de la science). On va taper et ça va filer droit, comme jadis ! Or «l'école-de-Jules-Ferry» (largement mythifiée) était liée à une promesse d'émancipation sociale que la politique de destruction systématique du droit du travail, de l'Etat-providence, des services publics, de la justice fiscale menée par ces forcenés est en train de balayer.

Ce ne sont pas des coups de menton pathétiques ou un service national universel en seconde (drapeau ! uniforme ! Marseillaise !) qui vont «réarmer» un signifiant ainsi évidé. Idem pour le «réarmement démographique» : l'OSS 117 élyséen, féru du décorum de «la France du général de Gaulle», mais avec les accents séniles de Pétain, ignore que l'on fait des enfants quand on a confiance en l'avenir, ce que l'accumulation des effondrements (scolaire, hospitalier, politique et climatique) auxquels sa politique contribue activement, entame sérieusement.

Derrière la «com», il y a hélas une logique. Celle des signifiants vides est caractéristique du fascisme : on exalte la «communauté» nationale, la «patrie», les «forces vives» et les Allemands, Italiens, Français moyens pour masquer une politique de classe grossière, qui conforte les élites (banque, industrie, églises...) traditionnelles. Au-delà du n'importe quoi («mon quinquennat sera écologique ou ne sera pas», «nos vies valent mieux que leurs profits», etc.), il y a, en effet, une petite musique (ou une grosse caisse) inquiétante. Réarmer ? Régénérer ? Combattre le «grand effacement» (clin d'oeil évident au «grand remplacement») ? pour que «la France reste la France» ? Cela devient criant, cette pente vers l'extrême droite avec, bonus, un autre signifiant vide : la France, c'est la liberté (de manifester sans être mutilé, de combattre la corruption grâce à l'association citoyenne Anticor, que le gouvernement entrave...), l'égalité («ceux qui ne sont rien»...), la fraternité (qui commence par la mixité scolaire).

L'historien est partagé entre l'éclat de rire et l'épouvante, comme Léon Blum face à Déat et à Marquet qui éructaient «ordre, autorité, nation» en 1933 avant de finir collabos. Les appels du pied à l'extrême droite se font désormais avec des bottes de sept lieues. Le bruit des bottes : l'extrême centre, qui s'allie toujours à l'extrême droite (Italie, 1922, Allemagne, 1932), y trouve son intérêt et sa jouissance.

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submitted 9 months ago by NuclearPlatypus@jlai.lu to c/france@jlai.lu

Lucas est mort d’une septicémie aux urgences de Hyères (Var), après des heures d’agonie dans un couloir. Un autre patient, présent ce jour-là de septembre 2023, dénonce l’inaction des médecins.


Les minutes s’écoulent au rythme des SMS de détresse. Ce 30 septembre, les lèvres bleues, le palpitant à mille à heure, Lucas est emmené par les pompiers à 15h50 aux urgences d’Hyères (Var), après de violentes douleurs à l’abdomen, survenues la veille au soir.

Le technicien de 25 ans, installé sur un brancard dans le couloir, trouve à peine la force d’écrire à sa maman, Corinne. À 18h02, il lui envoie : « Je me plains à tout le monde que j’ai du mal à respirer. Mais personne ne fait rien. » Quatre minutes plus tard : « Jsp (je sais plus) quoi faire. J’ai tellement mal. » Elle : « Crie, j’en peux plus, au secours, dis que tu veux voir tes parents qui sont dehors. » Une infirmière lui fait une prise de sang. Puis plus rien. 18h17, ses SMS se font lapidaires : « Horrible maman, horrible. »

Ses parents aimeraient crier, forcer la porte des urgences mais les accompagnants n’ont pas le droit d’entrer. Son cœur de maman déchiré, Corinne comprend instantanément la gravité de son état. « Lucas ne se plaignait jamais ! S’il dit ça ne va pas, c’est que ça ne va pas du tout », martèle cette fonctionnaire de 63 ans, habitante du Beausset, près de Toulon.

« Il répétait, à bout de souffle, s’il vous plaît, mais personne ne s’arrêtait »

D’une voix forte, sans jamais s’autoriser à vaciller, elle raconte heure par heure le calvaire de son fils, la passivité des blouses blanches, son agonie dans le silence. Jusqu’à la fin. « J’avais trois enfants, il m’en reste deux. »

Ce soir-là, dans le couloir, un autre brancard fait face à celui de Lucas. Damien, du même âge, le dos bloqué, l’entend gémir durant des heures : « On voyait qu’il souffrait le martyre. Un médecin lui a demandé s’il avait fumé du cannabis, sûrement parce qu’il avait des dreadlocks. Puis a conclu, en moins de 30 secondes, à une indigestion. J’ai ensuite compris que c’était plus bien grave en le voyant se tordre de douleurs. Il répétait, à bout de souffle, s’il vous plaît, s’il vous plaît, mais personne ne s’arrêtait. »

Lucas est en réalité victime d’une infection à méningocoque dont la souche particulière attaque son ventre. Sans antibiotique, il ne survivra pas. « Vers 21h30, il était assis sur son brancard et d’un coup, il s’est effondré. Deux infirmiers sont passés devant lui sans le regarder. J’ai crié au troisième : Excusez-moi, il fait un malaise ! »

« Vous avez tué mon fils ! »

Là, tout va très vite : il entend « 5,3 » de tension, le médecin arrive. « Le début de la fin », soupire Damien, qui fait dès le lendemain un signalement au procureur. Lucas n’aurait reçu une injection d’antibiotiques que vers minuit trente, après presque neuf heures d’attente. Mais il est déjà dans le coma. L’infection qui s’est répandue dans son sang lui provoque deux arrêts cardiaques. Les parents, enfin autorisés à entrer, assistent au sauvetage impossible. Son père hurle : « Vous avez tué mon fils ! »

Les jours suivants, la famille découvre un courrier anonyme, tamponné des urgences, dans la boîte aux lettres de Lucas. Avec à l’intérieur, son dossier médical. Comme une série de preuves laissées à la famille qui a porté plainte pour homicide involontaire contre l’hôpital. Contactée, la direction de l’établissement nous répond « qu’en raison du secret médical, elle n’est pas autorisée à divulguer les détails du dossier du patient ». À la famille, ajoute-t-elle, « nous avons présenté nos sincères condoléances ».

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submitted 9 months ago by NuclearPlatypus@jlai.lu to c/france@jlai.lu
[-] NuclearPlatypus@jlai.lu 2 points 9 months ago* (last edited 9 months ago)

C'est peut-être d'autres brigades que celles du Hamas (al-qassam). Il y a les brigades du JIP (al-Qods) et d'autres liées précédemment au Fatah mais qui ne sont quasiment plus actives.

Je pense que c'est aussi un exercice de propagande du Hamas mais plutôt inédit : reconnaître des "erreurs". C'est évidemment pris comme une provocation et une euphémisation du massacre, mais c'est aussi peut-être pour dire "regardez nous on assume de dire que des civils ont été ciblés contrairement à Israël". Et c'est pas comme s'ils annonçaient ça le lendemain du massacre, mais après 3 mois avec le bilan qu'on connaît, le timing est important.

Tout ça pour dire que la Palestine est enfermée par un gouvernement nihiliste à Gaza et une autorité palestinienne en déclin total et autoritariste en Cisjordanie. Les dernières années ils se sont fait plusieurs fois massacrés à balles réelles quand ils manifestaient pacifiquement, et réprimés quand ils manifestaient contre le Hamas.

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submitted 9 months ago by NuclearPlatypus@jlai.lu to c/france@jlai.lu

Le ministère de l’enseignement supérieur vient de rappeler à l’ordre le lycée Stanislas, dans un courrier que Mediapart s’est procuré, évoquant « un contournement » de Parcoursup. Selon des documents que nous avons consultés, le fils aîné de la ministre de l’Éducation nationale, admis en prépa dans cet établissement l’an dernier, a bénéficié de ce système « maison » qui contrevient au principe d’égalité des chances.


L’énergie mise par la ministre de l’Éducation nationale à défendre Stanislas, au lendemain de sa nomination, devient de plus en plus choquante. D’après des informations recueillies par Mediapart, le fils aîné d’Amélie Oudéa-Castéra, 17 ans, actuellement en classe préparatoire dans cet établissement parisien catholique huppé, a bénéficié d'un système de « contournement » des règles de Parcoursup.

Chaque année, 600 000 lycéen·nes (du public comme du privé) se plient à cette procédure casse-tête, et doivent formuler des vœux pour des formations post-Bac, puis attendre avec angoisse de voir laquelle les accepte. Mais tout le monde n’est pas soumis à la même enseigne.

Dans leur rapport, remis cet été à Gabriel Attal (alors ministre de l’Éducation nationale) et gardé secret jusqu’à sa publication par Mediapart le 14 janvier, les inspecteurs généraux ayant mené l’enquête sur Stanislas dénoncent une forme d’arrangement entre l’établissement et certain·es de ses élèves de Terminale souhaitant intégrer ses prestigieuses classes préparatoires.

Le schéma ? Avant même que la procédure officielle de Parcoursup ne démarre, certain·es élèves de Stanislas obtiennent « la garantie d’être admis », selon les inspecteurs. « En échange », elles et ils « sont incités à renoncer » à formuler d’autres souhaits sur Parcoursup – à rebours des recommandations de l’Éducation nationale, qui conseille aux lycéen·nes de multiplier les vœux (par exemple une « prépa » à Henri IV en vœu N°2, à Franklin en vœu N°3, afin de maximiser ses chances et garder une liberté de choix).

Avec les « pratiques » en cours à Stanislas, « contraires aux principes et aux règles » de Parcoursup censées favoriser la transparence et l’égalité de traitement des candidatures, l’élève dispose d’une place au chaud. Quant à l’établissement, il obtient l’assurance de ne pas perdre de bons profils déjà acquis à « l’esprit Stan ». C’est gagnant-gagnant. Sauf évidemment pour les élèves du « dehors », qui croient encore à l'égalité des chances et ne bénéficient d’aucun coupe-file.

38 élèves de « Stan » ont formulé un vœu unique

Les inspecteurs ont ainsi bondi devant des chiffres tirés de la base nationale 2023 de Pacoursup : au printemps dernier, sur les 41 lycéens en France qui ont pris le risque étonnant de formuler un vœu unique pour une prépa du lycée qu’ils fréquentaient déjà, 38 étaient en Terminale à « Stan »… Aux yeux des inspecteurs généraux, cette bizarrerie statistique atteste du caractère « très isolé » des pratiques ayant cours dans ce fleuron de l’enseignement catholique de la capitale.

Le rapport ne livre aucun nom d’élève. Mais d’après nos informations, parmi ces 38 candidat·es de 2023, se trouvait le fils aîné d’Amélie Oudéa-Castéra, alors excellent élément de Terminale – il a entre-temps obtenu une mention très bien au Bac –, scolarisé dans la « maison » depuis sa moyenne section de maternelle. Sur Parcoursup, au printemps dernier, il a indiqué comme seul vœu d’être intégré dans une prépa HEC (aussi dite ECG) à « Stan ».

Il a formulé précisément quatre « sous-voeux », avec ou sans internat, avec l'option éco (ESH) ou histoire (HGG). Rien d’autre, en dehors de Stanislas. Une stratégie risquée pour le commun des mortels, mais lui a bien été sélectionné, parmi plus de 2 000 candidatures enregistrées.

Comme d’autres familles, la famille [de la ministre] a suivi la procédure prévue par Stanislas.

Entourage d’Amélie Oudéa-Castéra

Questionnée sur le fait que son fils ait bénéficié d’un « contournement » des règles, la ministre de l’Éducation nationale ne conteste pas directement ce terme, employé par l’inspection générale dont elle a désormais la tutelle. Mais elle fait répondre par son entourage que sa famille « a suivi […] chacune des étapes prévues par Parcoursup », et surtout qu’elle a, « comme d'autres familles », « suivi la procédure prévue par Stanislas ». Une manière de renvoyer la responsabilité vers l’établissement catholique.

Car son entourage doit bien concéder que son fils aîné « a reçu un avis favorable de Stanislas » à l’issue « du conseil de classe du deuxième trimestre », c’est-à-dire avant le dépôt de sa candidature officielle sur Parcoursup. Ensuite, il a « fait le choix de rentrer ce seul voeu » sur la plateforme, « préférant comme beaucoup d’élèves partout en France rester dans son établissement d’origine ». Ils sont pourtant extrêmement rares, on l’a vu, celles et ceux qui ne prennent pas la précaution d’inscrire d’autres vœux dans Parcoursup, au cas où. 

Comment la ministre de l’Éducation nationale, déjà contrainte de se déporter des décisions relatives à l’avenir de Stanislas, peut-elle désormais conserver une légitimité à s’exprimer sur Parcoursup, sur ses avantages et ses travers, sur ses réformes nécessaires ? Il s’agit pourtant d’un sujet de préoccupation majeur dans les milieux éducatifs depuis son lancement en 2018.

D'après nos informations, le ministère de l'enseignement supérieur, qui a la tutelle sur Parcoursup, a pour sa part réagi cette semaine. Dans un courrier daté du 17 janvier, que nous nous sommes procuré, la directrice de l’enseignement supérieur rappelle au directeur de Stanislas qu’il est tenu de respecter la charte de Parcoursup et ses « principes de non-discrimination [entre tous les lycéens de France – ndlr], d’égalité de traitement, d’équité et de transparence ».

Des élèves choqués

Dans son courrier, le ministère demande à la direction de l’établissement « de bien vouloir confirmer que toutes les dispositions sont prises en ce sens pour la session 2024 qui s’ouvre ». Et il y a du travail. Car Mediapart a recueilli de nombreux témoignages d’ancien·nes élèves et parents d’élèves, qui confirment le système mis en place par Stanislas. Un procédé qui aboutit à une proportion dans ses classes prépa d’environ 25 % d’élèves issu·es de ses propres rangs. C’est une des clefs de la sauvegarde de l’entre-soi propre à « Stan », mélange d'élitisme scolaire et de reconnaissance de classe.

« L’établissement a déjà en tête [avant l'ouverture des candidatures sur Parcoursup – ndlr] une sorte de “short list” de bons élèves qu’ils veulent voir aller en “prépa Stan”, explique Jérôme, ancien élève de prépa. Et ils vont les voir pour leur dire qu’ils seront admis à condition qu’ils ne mettent qu’un seul vœu sur Parcoursup. »

Certain·es ont été prévenu oralement, beaucoup ont dû envoyer un courrier de motivation préalable. « Au second trimestre, vers février, ceux qui ont postulé en prépa reçoivent la réponse sur une fiche rendue en même temps que le bulletin », détaille Léna, aujourd’hui étudiante. « Avant Parcoursup, tous les élèves qui veulent aller en “prépa Stan” savent déjà s’ils seront acceptés ou pas », insiste un autre témoin.

Des préfets (équivalent des conseillers principaux d’éducation) se chargeraient de préciser aux meilleur·es élèves qu’elles et ils ne doivent formuler qu’un seul vœu dans Parcoursup. « Ma mère avait demandé en réunion pour s’en assurer, et on lui avait confirmé ce procédé, se souvient Sarah, en prépa à « Stan » jusqu’en 2020. Un de mes meilleurs amis, excellent, avait quand même mis trois voeux sur Parcoursup. Le préfet était venu le voir juste avant la clôture des dossiers pour lui hurler de n’en mettre qu’un. C’était très rude. »

« Mes profs m’avaient dit que je ne devais prendre aucun risque, confie Judith, qui au départ ne voulait pas vraiment faire sa prépa à « Stan ». J’étais classée parmi les meilleurs de ma classe mais mes notes étaient tellement basses [par rapport à ce qui se fait dans d'autres lycées] que j’ai mis un seul vœu, pour avoir l’assurance d’aller dans une prépa. On nous disait que si on mettait d’autres voeux, on serait traité comme des élèves lambdas sans l’assurance d’être pris à Stan. »

Il ne nous viendrait jamais à l’idée de donner une stratégie si risquée à nos élèves.

Une professeur de prépa privée à Paris.

Dans le monde enseignant, nombre de spécialistes des classes préparatoires, du public mais aussi du privé, ont lu ce passage du rapport d'inspection avec un certain effarement. « Il est illégal pour un établissement d’origine de demander à ses élèves de ne formuler qu’un nombre limité de vœux et de contrôler les vœux, estime un professeur de philosophie d'une prépa francilienne publique, par ailleurs chargé du suivi de la procédure Parcoursup. Tous les signataires de la Charte le savent : en tant que lycée hébergeant des prépas, soit vous vous positionnez comme un établissement d’origine et vous aidez vos élèves à faire leurs vœux, soit vous vous positionnez comme établissement d’accueil. Mais ce que fait ma main gauche, ma main droite doit l’ignorer. » Et de rappeler ce qui devrait relever de l'évidence : « Mon proviseur ne me donne pas les moyens d’aller regarder les vœux des élèves du lycée ou de faire pression sur eux. »

« Je n’ai jamais entendu parler d’une telle chose ailleurs, déclare Christophe Viscogliosi, professeur dans une « prépa » ECG publique. C’est une pratique complètement à l’opposé de la philosophie de Parcoursup, qui est d’ouvrir l’éventail des choix. Outre que cela raréfie les places pour les élèves qui ne sont pas du lycée, l’établissement crée une sorte de rapport de force alors même que Parcoursup était censé rééquilibrer ce rapport de force. »

« Nous, ce sont nos élèves qui nous choisissent, pas l’inverse », s’indigne aussi Armelle Picardat, professeure de géographie en « prépa » au lycée Jules Ferry, dans la capitale. Avec des pratiques comme celles de Stanislas, « les élèves ne sont pas réellement mis en concurrence : ils prennent les meilleurs de chez eux et s’il reste des places à la marge, ils ouvrent… Il y a une injustice, les autres élèves n’entrent pas dans la moulinette ! »

Cette « moulinette », il est vrai, n’est pas toujours aussi transparente qu’elle le devrait. Et nombre de formations sélectives bricolent un algorithme « maison », qui attribue des « notes » aux candidatures en fonction du lycée d’origine (ses résultats, sa réputation, etc), et pas seulement des notes obtenues par les élèves. Mais le « contournement » de Parcoursup mis en place par Stanislas est d’une autre nature.

« Il ne nous viendrait jamais à l’idée de donner une stratégie si risquée à nos élèves, insiste une professeur de prépa privée parisienne sous contrat. Stanislas pousse hyper loin la coercition, c’est dingue. »

Questionné par Mediapart, le directeur de Stanislas Frédéric Gautier, qui n’a pas souhaité répondre sur le cas du fils d’Amélie Oudéa-Castéra, nous a transmis un communiqué indiquant n'avoir « pas été informé », par l'académie de Paris, « que le fait que certains candidats n’entraient qu’un vœu pour Stanislas posait un problème ».

Sur le fond, il confirme que des « avis » sont donnés, en amont des candidatures officielles dans Parcoursup, aux élèves de Terminale envisageant une prépa « maison » : elles et ils « ont alors la possibilité de candidater à Stanislas et dans d’autres établissements [...] ou bien de considérer qu’à l’aune de cet avis, ils ne candidatent qu’à Stanislas. » Mais Frédéric Gautier dément tout « préjudice pour eux », comme « pour les candidats extérieurs ». Une vision opposée à celles de l’inspection générale.

Quant au directeur diocésain de l'enseignement catholique, sollicité par nos soins, il n'a pas souhaité réagir.

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submitted 9 months ago by NuclearPlatypus@jlai.lu to c/france@jlai.lu

Je recommande ses autres dessins si vous ne connaissez pas !

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submitted 9 months ago by NuclearPlatypus@jlai.lu to c/france@jlai.lu

Le CAV/CRAV qui revient à ses anciennes pratiques : poser des bombes.... Heureusement les chaînes d'info (et Beauvau) ne vont probablement pas en parler H24, car la différence avec la FNSEA c'est qu'ils sont cagoulés !

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submitted 9 months ago by NuclearPlatypus@jlai.lu to c/france@jlai.lu

Lors de leurs interrogatoires devant la cour d’assises, mardi et mercredi, les trois accusés ont réfuté tout acte de violence, n’admettant que quelques gestes ratés ou « malheureux » visibles sur des images.

Comme les trois singes de la sagesse, les policiers impliqués dans « l’affaire Théo » n’ont rien vu, rien entendu et rien dit. C’est en tout cas ce qui ressort de leurs interrogatoires devant la cour d’assises de Seine-Saint-Denis, mardi et mercredi. 

Le 2 février 2017, à Aulnay-sous-Bois, ils affirment n’avoir vu aucune violence illégitime commise par l’un de leurs collègues. N’avoir entendu aucun cri de douleur ni aucune plainte de Théodore Luhaka. N’avoir prononcé aucune des paroles racistes ou humiliantes rapportées par le jeune homme. Ne s’être pas rendu compte qu’il était gravement blessé.  

Au début de ce contrôle « d’initiative », alors qu’une dizaine de jeunes hommes sont alignés contre un mur, les deux coéquipiers de Marc-Antoine C. disent qu’ils n’ont pas vu leur collègue mettre une gifle à l’un de ces garçons, prénommé Sékou. 

Tony H. voit seulement Marc-Antoine C. « repousser » l’adolescent, quand celui-ci a « un geste de défiance » à l’égard du policier. « Narquois et provocateur, il vient mettre sa tête contre la mienne », complète Marc-Antoine C., qui entend « remettre une distance de sécurité ». « Je ne lui mets pas de claque, j’appose la paume de ma main sur son visage. »

C’est ce geste qui déclenche l’intervention de Théodore Luhaka, pris dans le contrôle d’identité alors qu’il n’a rien à se reprocher : il veut défendre Sékou. Jérémie D. ne tourne la tête que lorsque « le ton monte de façon anormale ».  

« J’ai vu M. Luhaka mettre un coup de poing au visage de Marc-Antoine C. », affirme Tony H., le benjamin de l’équipage. S’il nie avoir frappé le premier, Théodore Luhaka admet avoir pu mettre un coup en se débattant. Marc-Antoine C. a déposé plainte par la suite. 

Une dizaine de coups avant les menottes

À la barre, les policiers expliquent avoir eu toutes les peines du monde à maîtriser Théodore Luhaka et justifient presque tous leurs gestes par sa résistance déterminée.

Jérémie D. « décide de prêter main-forte à [ses] collègues » en l’amenant au sol. Mais il « ne réussi[t] qu’à moitié, tombe et [se] retrouve en dessous ». Dans la confusion, le policier libère un jet de lacrymo qui atteint Théodore Luhaka au visage, mais aussi Marc-Antoine C. et lui-même. « Complètement out », Jérémie D. se roule en boule et s’agrippe aux jambes de l’interpellé. 

Pendant ce temps, Marc-Antoine C. déploie sa matraque télescopique et donne sept coups « sans effet » sur les bras et les jambes de Théodore Luhaka. Il espère le contraindre, par la douleur, à se laisser menotter contre un muret. S’il a déclaré, au début de l’enquête, n’avoir mis que des coups « fouettés », c’est bien le huitième, de bas en haut, qui traverse le caleçon de Théodore Luhaka et le blesse gravement à l’anus. 

À la barre, Marc-Antoine C. affirme avoir visé les muscles du « haut de la cuisse », « sous le pli de la fesse », « pour le faire fléchir et chuter au sol » afin de finaliser l’interpellation. Il dit s’être particulièrement inquiété pour son collègue Jérémie D., qui « ne se relevait pas » et aurait pu être piétiné.  

« Je ne vois pas son pantalon descendre et je ne vois pas le coup d’estoc », affirme Tony H., concentré sur sa tentative d’attraper le bras du jeune homme. Tombé au sol, celui-ci « gesticule » encore. « Donc je lui porte un coup au niveau du ventre afin de lui couper la respiration et parvenir au menottage », poursuit Tony H., qui défend son geste « contrôlé » et appris « en école de police ». Marc-Antoine C. met encore deux coups de matraque. 

Un geste « d’énervement » 

Une fois que Théodore Luhaka est menotté et assis par terre, Jérémie D. se relève, indemne. Des « individus hostiles » étant restés sur place, il lance une grenade lacrymogène pour les éloigner. Puis revient auprès de l’interpellé et le pousse violemment : sa tête heurte le muret. 

Aux yeux de l’avocat général, Loïc Pageot, il s’agit d’un « acte de rétorsion ». « C’est un mauvais geste, que je n’aurais pas dû faire », concède le policier, qui conteste toute « volonté de blesser ou de faire mal ». « J’estime que j’ai mordu la ligne blanche, mais je ne l’ai jamais franchie », ajoute-t-il. 

« L’énervement » et « la crispation » de Jérémie D. auraient également causé un nouveau « départ involontaire » de gaz lacrymogène. « Vraiment ? », s’étonne Philippe-Henry Honegger, avocat de la famille de Théo, faussement inquiet pour l’accusé : « Vous avez la maladie de Parkinson ? »

De son côté, Marc-Antoine C. ne reconnaît qu’un coup illégitime dans cette séquence. « Quand je m’adresse à Théodore Luhaka et lui demande pourquoi il a fait ça, il ne répond pas. Du revers de la main j’ai un stimuli, une gifle. » « Un stimuli ! », bondit Antoine Vey, l’avocat de la partie civile, provoquant les rires de la salle. « On vous montre que vous mettez une baffe et vous dites que c’est un stimuli ! — Oui, j’ai mis une gifle à M. Luhaka et je le regrette. C’est un geste qui n’est pas correct, mais je n’arme pas le poing. Je ne suis pas là pour lui détruire le visage. »

Coup de pied ou « geste furtif » 

Les policiers relèvent ensuite Théodore Luhaka et le conduisent derrière un mur. Tous démentent avoir voulu échapper aux caméras de surveillance. Même s’ils se retrouvent hors champ, ils répètent que l’ensemble de l’interpellation a lieu « au vu et au su de tout le monde ». 

En attendant les renforts, les agents veulent « faire asseoir » Théodore Luhaka, qui « n’obtempère pas ». « Donc on le soulève chacun par un membre et on le fait asseoir », précise Jérémie D. Une vidéo, tournée par une voisine depuis sa fenêtre, montre les policiers en train d’effectuer cette manœuvre. 

Sur ces images, Tony H. semble mettre un coup de pied. Dos à une salle d’audience incrédule, le policier soutient que ce « geste furtif » ne visait pas Théodore Luhaka mais un objet qui se trouvait en dessous de lui, peut-être une gazeuse lacrymogène, pour éviter qu’il ne tombe dessus. « C’est grotesque, tranche Me Antoine Vey. Votre système de défense consiste à ne jamais reconnaître le moindre geste violent. »

Sans surprise, Marc-Antoine C. ne se souvient pas du coup de pied de son collègue. Et personne ne s’explique comment Théodore Luhaka a perdu l’une de ses baskets, que les policiers « oublient » sur place. 

Il ne se plaint pas, il ne dit rien.

Le policier Jérémy D.

Théodore Luhaka dénonce de nouvelles violences dans le véhicule de police qui le ramène au commissariat, accompagnées d’insultes racistes. Jérémie D. « démen[t] formellement ». « C’est inconcevable », ajoute Marc-Antoine C., pour qui « dans cette affaire il n’y a aucune connotation raciste ». Au cours de sa carrière, il n’aurait d’ailleurs jamais entendu de propos de ce genre. 

Les policiers décrivent au contraire un trajet silencieux, marqué par la tension qui retombe et les effets persistants du gaz lacrymogène. Tous soutiennent n’avoir pas réalisé que Théodore Luhaka était gravement blessé, seulement qu’il saignait du nez. « Si on avait entraperçu un danger vital pour M. Luhaka, forcément on aurait appelé les pompiers, jure Jérémie D. On ne voit pas qu’il va mal. Il ne se plaint pas, il ne dit rien. »

En arrivant au commissariat, ils n’auraient pas non plus vu la large tache de sang laissée par le jeune homme sur la banquette arrière de leur voiture. « Je n’ai pris conscience de sa blessure qu’au moment de la garde à vue », affirme Tony H. Alerté par le chef de poste, qui prévient les secours, il le reconnaît : « Je ne suis pas médecin mais il n’était pas dans le meilleur de ses états. »

Une fois le blessé évacué par les pompiers en fauteuil roulant, les policiers affirment n’avoir pas échangé entre eux dans la nuit jusqu’à leur placement en garde à vue. Tony H. rédige le procès-verbal d’interpellation, dont l’avocat général pointe les « imprécisions » : « Vous n’évoquez pas le fait que Théodore Luhaka saigne, qu’il a le tee-shirt imbibé de sang, le nez éclaté, les yeux boursouflés. » Réponse timide : « C’était l’un de mes premiers PV, je sais qu’il n’est pas parfait. C’est une erreur de ma part. »

Un accusé en pleine « incompréhension » 

Pendant ce temps, Marc-Antoine C. explique s’être posé des questions. « Est-ce qu’on l’avait fait asseoir sur quelque chose de coupant ? Est-ce qu’il ne serait pas venu percuter ma télescopique ? Sur le moment je pense que je lui ai causé une plaie, pas une pénétration comme on me l’a annoncé après. Je suis dans une totale incompréhension, dépassé par les événements. Je n’ai jamais voulu provoquer une telle blessure. C’était effarant, j’étais complètement perdu. »

« Vous êtes toujours beaucoup plus précis quand vous décrivez ce que vous avez subi que ce que vous avez fait subir », s’agace l’avocat général. « Vous continuez à ne pas comprendre la violence que vous avez déployée, tous ensemble, jusqu’à ce que quelqu’un siffle la fin de la récréation », renchérit Antoine Vey. 

Face aux « rumeurs » de comportements violents associés à leur brigade spécialisée de terrain (BST), les agents se défendent. « C’est purement calomnieux », balaie Marc-Antoine C., pour qui la BST « essaie de faire au mieux » dans un contexte difficile. « On nous fait passer pour des policiers tout le temps agressifs, racistes, haineux, c’est pas du tout ça. » Jérémie D. dément aussi ces « accusations fantaisistes ».

Avant la journée consacrée aux plaidoiries et réquisitions, jeudi, Thibault de Montbrial propose à son client, Marc-Antoine C., de dire quelques mots. Il se plie à l’exercice. « Je sais que M. Luhaka et sa famille sont en colère contre moi, j’en ai bien conscience. Mais je n’ai jamais voulu cette blessure, tous les jours j’y ai pensé. Je compatis à votre douleur même si vous me détestez. » De leur côté, Jérémie D. et Tony H. ont employé une formule identique, tout en regrettant la blessure : « On a été droits dans nos bottes. »

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Pour faire de bons Français, il faut de l’ordre, chanter « La Marseillaise » et un « grand plan contre l’infertilité ». Une conf de presse digne d’un plateau de CNews.


On était venus à l’Élysée en quête d’un bien énigmatique point-virgule présidentiel ; on en est ressortis avec des points de suspension (signifiant une sourde désapprobation…), d’interrogation (il a vraiment dit ça ?) et d’exclamation (n’importe quoi !), mais de point-virgule, point. Alors qu’il devait, ce point-virgule en forme de conférence de presse donnée ce mardi soir, symboliser le fameux « rendez-vous avec la Nation » décrété par Emmanuel Macron aux trois quarts de son règne. C’était sa vision, sa stratégie, le sens du récent remaniement : tout était contenu dans ce « point-virgule », que glissaient quelques zélés conseillers élyséens à la presse pour décrire « une nouvelle phase de conquête » (Libération) et une façon de « donner une respiration à sa décennie de pouvoir en changeant de ton comme on pourrait le faire dans une partition de musique ou dans une poésie » (Le Monde).

Et c’est ainsi que vos serviteurs se retrouvent dans la queue journalistique léchant l’Élysée ce mardi soir pour élucider cette affaire de point-virgule et enfin piper quelque chose à la politique du président de la République et à son nouveau gouvernement, à droite toute (lire l’épisode 8, « Macron dégaine son Attal bazooka »). Et là, tandis que les confrères et nous nous gelons sagement les miches (relevons que la guérite près de l’entrée est vide de tout gendarme mais équipée d’un radiateur – c’est bien – allumé – c’est pas bien), une Laurence Ferrari de CNews, Europe 1, Paris Match déboule, grillant magistralement toute la file pour rejoindre ses complices juste avant la porte du Château et ne poireauter que dix minutes dans la froidure.

Quand trois quarts d’heure et une hypothermie frôlée plus tard, nous entrons dans la salle des fêtes de l’Élysée où se tient la sauterie que suivront 8,7 millions de téléspectateurs sur huit chaînes, nous comprenons : l’empire Bolloré s’est installé en bonne place, pile face à l’estrade présidentielle. Au tout premier rang s’affichent ainsi Laurence Ferrari (donc), Sonia Mabrouk (Europe 1, CNews), Gauthier Le Bret (service politique de CNews, JDD), Thomas Bauder (directeur de l’information de CNews), Olivier Benkemoun (CNews, Europe 1), Florent Tardif (CNews, Paris Match). À raison de deux accréditations max par média, ils ont explosé les compteurs – et encore en ont-ils réclamé pas loin d’une vingtaine, nous chuchotent de mauvaises langues bien informées –, arguant qu’untel représentait Paris Match, l’autre CNews et celle-là Europe 1, même si tous turbinent alternativement voire simultanément dans la même armada bolloréenne.

Il faut se figurer la mise en scène. À droite du Président, sur quatre rangs, la presque totalité du nouveau gouvernement, avec Gabriel Attal au prems qui depuis huit jours qu’il est à Matignon a pris vingt ans et un sacré coup de pelle. À sa gauche, les cabinets d’Emmanuel Macron et du Premier ministre, avec le secrétaire général de l’Élysée Alexis Kohler devant. Et face à lui, l’empire de Vincent Bolloré, qui compte déjà deux scalps ministériels à son actif : celui de Pap Ndiaye exfiltré en juillet dernier et celui de Rima Abdul Malak éjectée la semaine dernière, tous deux ayant en commun d’avoir été les seuls à critiquer les médias dudit Bolloré (lire l’épisode 9, « Rachida Dati à la Culture, ça Rima rien »). Côté Élysée, la mise en scène de cette conférence de presse évoque, et ce n’est bien sûr pas anodin, celles que tenait Charles de Gaulle, assis derrière un bureau, et en soirée. Si vous n’avez pas la ref, les plus vieux des téléspectateurs l’ont, eux, et ils votent, eux. Toujours pratique, l’invocation de De Gaulle pour faire passer pour de la nostalgie des vieux trucs puants, demandez à Éric Zemmour qui s’est déclaré candidat à la présidentielle de 2022 en parodiant l’appel du 18 juin (lire l’épisode 174 de L’empire, « Zemmour, le candidat du système Bolloré »).

20 h 15, le président de la République arrive, annoncé par quelque majordome élyséen ; l’immense majorité de la salle se lève, même s’il nous faut dénoncer, dans notre coin du moins, les fesses de Libération, de Paul Larrouturou de TF1 et des Jours qui n’ont pas quitté leurs sièges – on n’est pas à l’école hein, on est là pour travailler.

Macron a multiplié les allusions pour le premier rang, tenu par l’empire Bolloré, et pour celle dont il est le haut-parleur : l’extrême droite

Et zéro point-virgule dans le propos liminaire d’Emmanuel Macron qui, c’est rare, ne dépasse pas trop les vingt minutes qu’il s’était attribuées, ni les deux heures de questions-réponses ensuite. De toute façon, pour les détails, il renvoie au gouvernement et au discours de politique générale de Gabriel Attal, prévu à la fin du mois. Mais s’il faut filer la métaphore ponctuative, on a dénombré des caisses et des caisses de traits d’union entre Emmanuel Macron et le premier rang de son auditoire journalistique, celui de l’empire Bolloré, ainsi qu’avec celle dont il est le haut-parleur : l’extrême droite (ou à la rigueur la droite ciottiste). Ainsi, ce slogan piqué à Éric Zemmour qui l’a lui-même piqué à Éric Ciotti – mais dont Emmanuel Macron revendique l’antériorité, ce qui ne change rien à l’affaire : « Pour que la France reste la France. » Ce que cette France doit rester, le président de la République l’a dessiné, en une série d’annonces comme autant de « réarmements » – parce qu’un « rendez-vous avec la Nation » ne peut se faire qu’avec un vocabulaire militaire, semble-t-il.

Pan, pan, pan : réarmement civique. « Chaque génération de Français doit apprendre ce que la République veut dire – une histoire, des devoirs, des droits, une langue, un imaginaire, le sens profond du respect et de l’engagement –, et cela dès l’enfance, en renforçant le soutien et l’exigence vis-à-vis des parents, en reprenant aussi le contrôle de nos écrans », entame Emmanuel Macron, affirmant s’appuyer sur un rapport d’experts. Des « restrictions » voire des « interdictions » d’écrans pour les enfants dont on se demande bien comment elles pourront se matérialiser, mais peu importe, ça donne le ton de la petite chanson désuète des annonces présidentielles sur l’éducation. Lâchez TikTok, les enfants, et enfilez votre uniforme – ou plutôt votre « tenue unique » dont Emmanuel Macron confirme l’expérimentation, voire, si elle est concluante, la généralisation dès 2026 – pour aller en cours d’instruction civique dont le « volume horaire sera doublé – une heure par semaine dès la cinquième ». Et en seconde, hop, « la généralisation du Service national universel » pour nous pondre des générations d’excellents Français.

Les jeunes regardent des séries où il y a des remises de diplômes et trouvent ça super !

Emmanuel Macron, ambivalent sur la question des écrans pour notre belle jeunesse

On ne se ferait pas une petite Marseillaise là-dessus ? Allez, et ce dès l’école primaire, et puis du théâtre aussi et de l’histoire de l’art – ça, c’est pour l’emploi fictif de Rachida Dati au ministère de la Culture, laquelle Dati vient en toute décontraction, ce mercredi sur RTL, de se déclarer candidate à la mairie de Paris, montrant la considération qu’elle porte à son tremplin de portefeuille. Et pour parachever la photo sépia d’écoliers en blouse aux doigts tachés d’encre, notre bon Président René Coty Emmanuel Macron promet « une cérémonie de remise des diplômes » au collège et au lycée. Et gare à celles et ceux qui auraient l’audace de trouver ça « vieux jeu », comme la journaliste de 20 Minutes Rachel Garrat-Valcarcel lors de la séance des questions, le Président se récrie : « Les jeunes regardent des séries où il y a des remises de diplômes et trouvent ça super ! » 

Pourvu qu’on ne leur enlève pas leurs écrans à ceux-là. En revanche, on devrait couper ceux du Président qui, manifestement, tournent en boucle sur CNews où il semble avoir puisé l’essentiel de ses annonces sur l’éducation. Pas assez cependant pour Laurence Ferrari, qui, fiche siglée CNews à la main, réclame : « Donnez-moi cinq mesures concrètes », comme si elle était en plateau – de fait, c’est à s’y méprendre.

Pan, pan, pan : « l’ordre ». Contre la drogue, qui touche « parfois même les villages », précise le président de la République – reprenant là, encore une fois, un refrain qui fait l’ordinaire des débats de CNews –, et contre l’islamisme radical. Et contre « l’oisiveté ». S’il reconnaît que la mort de Nahel M., le 27 juin dernier à Nanterre, tué par un policier, a pu être un « élément déclencheur », Emmanuel Macron met en effet les émeutes qui ont suivi sur le compte de « l’oisiveté » de jeunes qui « s’ennuyaient » faute de n’être plus à l’école – et des « écrans », bien sûr.

Pan, pan, pan : « le réarmement démographique ». En deux mesures. L’une bien nataliste consistant à remplacer le congé parental par un « congé de naissance », plus court, mais mieux rémunéré. L’autre étant un « grand plan contre l’infertilité », dont on voit mal à quoi il pourrait ressembler – l’interdiction des slips trop serrés pour ces messieurs ? Ou de la contraception, cette invention du diable, pour ces dames ? Ces dames qui goûteront à sa mesure le « regret », à peine concédé du bout des lèvres par Emmanuel Macron, sur son odieux soutien à Gérard Depardieu, tout juste « de ne pas avoir assez dit combien la parole des femmes qui sont victimes de ces violences est importante ».

Macron absout Amélie Oudéa-Castéra, invite discrètement Michel Sardou et tape sur le RN (pour de faux) 

Pan, pan, pan, Michel Sardou. Oui, oui, Mimiche. C’est la réponse d’Emmanuel Macron à la piteuse rentrée de sa nouvelle ministre de l’Éducation nationale Amélie Oudéa-Castéra qui a mis sur le dos de ces feignasses d’enseignants du public toujours absents et jamais remplacés sa décision de coller ses enfants dans le privé, l’übercatholique collège Stanislas. Du bidon, ainsi que l’a montré Libération, mais non, bien sûr pour Emmanuel Macron qui a absous la ministre (« Elle a été maladroite, elle s’en est excusée, elle a bien fait ») et plaidé pour « les deux écoles » (« Ce sont des choix intimes, personnels »), en invoquant là « les grands auteurs », mais sans citer l’interprète de la chanson, Michel Sardou.

Pan, pan, pan, c’est aussi le bruit du poing d’Emmanuel Macron frappant son bureau pour scander son « agissons, faisons, bousculons », alors qu’il est interrogé sur sa stratégie vis-à-vis du Rassemblement national, « le parti de la colère facile », dit-il. Le président de la République affirme vouloir « s’attaquer à ce qui fait voter pour le RN », mais il ne fait que le prendre de vitesse : en témoigne, après sa loi immigration allègrement votée grâce à l’extrême droite, tout ce fameux « rendez-vous avec la Nation » qui louche vers le parti de Marine Le Pen. Calcul politique un rien voyant, à six mois des élections européennes où l’extrême droite est donnée en tête dans les sondages. Il était là, ce sibyllin point-virgule, mais il n’était rien de plus que le smiley 😉, vous savez, ce petit wink complice, avons-nous conclu au sortir de l’Élysée en nous enfonçant dans la nuit noire de la rue du Faubourg-Saint-Honoré où loge le palais présidentiel : un clin d’œil d’Emmanuel Macron bien appuyé à l’extrême droite.

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Le député du Val-de-Marne Michel Herbillon était propriétaire d’un box de parking insalubre et sans fenêtres dans lequel a vécu un jardinier pendant des années, selon une enquête de Mediapart. L’homme est décédé dans le plus grand dénuement à l’âge de 76 ans. Le député n’a pas répondu à nos questions.


Sa vie ne se résume désormais qu’à un bout de papier. Un acte de décès dressé par une officière d’état civil de la mairie de Châtenay-Malabry, le 19 avril 2022. Deux semaines plus tôt, Raymond Sebas était retrouvé mort sur un trottoir de cette commune des Hauts-de-Seine, l’un des départements les plus riches de France. À 76 ans, cet homme n’avait pas de famille connue, pas d’ami·es, personne pour raconter précisément d’où il venait, ni qui il était.

La vie de Michel Herbillon, elle, s’étale déjà sur des pages entières de l’histoire politique française. À 72 ans, cet ancien cadre dans le secteur privé a enchaîné les mandats locaux et nationaux : maire de Maisons-Alfort de 1992 à 2017, conseiller général du Val-de-Marne de 1989 à 1998, élu à la Métropole du Grand Paris de 2017 à 2022, et député depuis 1997. En avril 2022, au moment de la mort de Raymond Sebas, Michel Herbillon est en campagne pour sa réélection à l’Assemblée, pour la sixième fois consécutive. Deux mois plus tard, la droite salue la nouvelle victoire de ce gaulliste convaincu, qui devient l’un des doyens du Palais-Bourbon.

Sur la rue Charles-de-Gaulle, à Châtenay-Malabry, un monument a été dressé en l’honneur du Général. C’est précisément à cet endroit que la boulangère de la boutique d’en face a découvert, dimanche 3 avril 2022, à 7 heures du matin, le corps inerte de Raymond Sebas. Elle a reconnu cet homme qui venait régulièrement acheter un café chaud. Il était face contre terre ; elle l’a retourné sur le dos en attendant l’arrivée des secours. Les pompiers ont tenté de le ranimer. Le septuagénaire était déjà mort, foudroyé par une crise cardiaque. À côté du buste de Charles de Gaulle, on peut lire cette citation du Général en lettres capitales : « TOUTE MA VIE, JE ME SUIS FAIT UNE CERTAINE IDÉE DE LA FRANCE ».

L’Hexagone a connu deux vagues de froid à l’hiver 2021-2022. En décembre puis janvier, les températures sont descendues jusqu’à − 6 °C à Châtenay-Malabry, selon les bilans de Météo-France. Raymond Sebas ne s’en est jamais plaint, même s’il passait ses journées dehors. Malgré son âge, celui que l’on appelait « Monsieur Raymond » travaillait encore comme jardinier. Tous les matins, il traversait à pied le parc de Sceaux pour aller chez ses clients, propriétaires de pavillons. Il traînait ses outils dans un chariot.

Le 22 février 2022, Michel Herbillon dépose à l’Assemblée nationale une proposition de loi visant à « faire reconnaître la dignité des personnes âgées dépendantes » comme une « grande cause nationale ». « Le respect de la dignité de la personne humaine constitue la base même des droits fondamentaux. Ce principe implique de ne pas réduire l’être humain à son corps en le traitant comme un objet. Il exige également que les besoins vitaux de la personne soient assurés », défend-il dans l’exposé des motifs. Le député insiste aussi : « Prendre conscience de la dignité de la personne âgée, c’est prendre conscience qu’elle reste un être humain à part entière. »

Raymond Sebas travaillait pour 15 euros de l’heure. Pour l’entretien de son jardin, Nadine* lui donnait 60 euros chaque mercredi. Cette formatrice en télécommunications, 59 ans, pleure quand elle se souvient de « Monsieur Raymond », un homme « extrêmement attentionné », qui s’occupait de ses plantations, « peu importe le temps ». Nadine tenait à ce que l’emploi du septuagénaire soit déclaré, en Cesu (chèque emploi service), mais elle le payait en liquide. Le vieil homme lui avait fait comprendre qu’il avait besoin de cash pour louer un « garage » au noir. Certains clients faisaient parfois des chèques à Raymond Sebas, mais ceux-ci n’étaient pas débités, laissant penser qu’il n’avait pas de compte bancaire. Sophie*, une concierge travaillant pour une famille qui avait fait appel au jardinier sans le déclarer, se souvient que le vieil homme était « fatigué » et avait des « pantalons un peu déchirés ».

En tant que député, Michel Herbillon touche une indemnité de 7 605,70 euros brut (de l’argent public) chaque mois. En 2022, il a aussi perçu 1 676 euros net pour son mandat à la Métropole du Grand Paris, ainsi que 6 840 euros en tant que président de l’Association du Grand Ensemble Liberté-Vert de maisons, un organisme qui regroupe quatre bailleurs sociaux gérant un parc de plus de 2 800 logements sociaux. À l’Assemblée nationale, l’élu Les Républicains (LR) dénonce régulièrement les « marchands de sommeil », qui offrent des conditions d’habitat « indignes ». En 2010, il proposait de créer une astreinte financière pour obliger ces propriétaires véreux à réaliser des travaux.

Quand le décès de Raymond Sebas a été constaté, une policière du commissariat de Châtenay-Malabry a découvert un trousseau de clés sur lui, dont celui du fameux « garage » qu’il louait, au sous-sol de la résidence Voltaire. « Monsieur Raymond » n’y entreposait pas que ses outils ; c’était sa maison. Dans ce box d’une dizaine de mètres carrés, sans fenêtres, le septuagénaire dormait sur un lit de fortune (deux petits matelas mis bout à bout sur une planche), avec un rideau et un petit radiateur d’appoint. Des bouteilles de jus de fruits, des boîtes de petits pois, un paquet de purée et des briques de lait étaient stockés sur plusieurs étagères. La cave était sale, il y avait même des excréments dans un coin.

Dans l’hémicycle, le député Herbillon alerte avec gravité sur le « poids de la solitude et de l’isolement » des personnes âgées. Le 17 juin 2020, il interpelle le secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé de l’époque, Adrien Taquet, sur les conséquences des restrictions de visite dans les Ehpad à cause du Covid. « Il y a urgence, car le moral de nos aînés est au plus bas. Il y a urgence à ce que notre société leur porte l’attention et l’affection qu’ils méritent de recevoir, développe-t-il. C’est une question de dignité. »

La policière de Châtenay-Malabry n’a pas réussi à savoir depuis quand Raymond Sebas était logé dans le box. Un autre jardinier, qui l’a côtoyé sans jamais lui poser de questions, pense qu’il est arrivé autour de 2008. Le gardien de la résidence parle de « plusieurs années » mais affirme, pour écourter la conversation, qu’il a toujours eu un « problème avec les dates ». Fuyant, il confirme toutefois, au détour d’une phrase, que c’est lui qui a mis en relation Raymond avec le propriétaire du box. « Il a passé le confinement à l’intérieur, c’est sûr », avance un troisième témoin.

Dans le box de la résidence Voltaire, une boîte contient des photos montrant « Monsieur Raymond », bien plus jeune et souriant, en compagnie d’autres personnes. S’il restait toujours discret avec ses clients, le jardinier faisait parfois allusion à sa vie d’avant, à un travail qu’il aurait eu dans l’industrie automobile, à une femme et une fille, une sœur qui aurait vécu dans les Hauts-de-Seine… La police n’a pas réussi à retrouver de proches. La dépouille de Raymond Sebas a été inhumée au cimetière de Châtenay-Malabry, après que quelques connaissances eurent été alertées du décès et se furent rassemblées pour lui organiser des obsèques. Le père François, curé de la paroisse de Fontenay-aux-Roses, est venu pour dire quelques mots.

Le propriétaire du box de « Monsieur Raymond » était Michel Herbillon. Le député n’était pas à l’enterrement.

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Trop anti-Bolloré, Rima Abdul Malak est remplacée par une sarkozyste pur jus. Une manœuvre de basse politique signée Emmanuel Macron.


« Ah la vache. » C’est sorti comme ça, froidement, de la bouche d’un acteur de la musique à qui l’on apprenait jeudi la nomination de Rachida Dati au ministère de la Culture. « Elle a vraiment toutes les qualités pour être ministre dans ce gouvernement : traître et mise en examen. » Voilà une ministre qui vient de faire des économies vestimentaires en se faisant ainsi rhabiller pour l’hiver à l’œil. La simple éviction de sa prédécesseure, Rima Abdul Malak, est déjà un aveu terrible et terriblement symbolique du premier gouvernement de Gabriel Attal¹ : dehors, celle qui s’est opposée à l’empire médiatique de Vincent Bolloré, à Gérard Depardieu et (en toute discrétion, certes) à la loi immigration votée grâce à l’extrême droite. Place à Rachida Dati, prise de guerre sarkozyste et surprise du chef – on parle d’Emmanuel Macron – pour faire diversion et qu’on ne s’appesantisse pas sur un gouvernement à droite toute, avec à l’honneur des hommes et des fidèles …

« Je suis restée libre », a lancé Rima Abdul Malak ce vendredi matin lors de la remise des clés de la rue de Valois, où loge le ministère de la Culture, à Rachida Dati, citant comme un « fil rouge de [ses] engagements », « la lutte contre l’extrême droite, ses manipulations, ses stigmatisations ». De fait, elle est la seule ministre à s’être élevée contre l’emprise grandissante des médias de Vincent Bolloré quand nombre de ses collègues n’ont pas hésité aller à la soupe dans Le JDD sauce Geoffroy Lejeune.

Le dernier à avoir qualifié CNews de chaîne « clairement d’extrême droite », c’était Pap Ndiaye, début juillet 2023. Dix jours après, il était viré de l’Éducation nationale, non sans avoir subi un éreintement en règle de tout l’orchestre médiatique de Vincent Bolloré. En février 2023, Rima Abdul Malak avait essuyé le même sort (lire l’épisode 190 de L’empire, « Rima Abdul Malak : l’empire Bolloré contre-attaque ») pour s’être inquiétée du sort de Paris Match et du JDD avoir rappelé le casier particulièrement chargé de CNews et C8, chaînes délinquantes multirécidivistes. Et estimé que ce serait « le rôle de l’Arcom, au moment de faire le bilan de ses obligations, de vérifier qu’elles ont bien été respectées pour pouvoir ensuite évaluer si la reconduction de cette fréquence est justifiée ou pas. » Comme toutes les chaînes bénéficiant de fréquences gratuites octroyées par l’État, CNews et C8 doivent respecter des conventions qui couchent noir sur blanc leurs obligations dont le pluralisme ou l’honnêteté de l’information, sur lesquelles s’asseoient joyeusement les chaînes Bolloré. Or, c’est en 2025 que leurs autorisations d’émettre arrivent à échéance et le processus légal qui voit l’Arcom examiner leur renouvellement ou leur reprise par de nouveaux candidats a déjà commencé.

En faisant le choix de remplacer Rima Abdul Malak, le Président envoie un message de pacte de non agression aux médias de Bolloré.

Un expert de la Macronie

L’ancienne conseillère culture d’Emmanuel Macron était pourtant souvent bonne élève comme quand elle tance le discours anti-gouvernement de la cinéaste Justine Triet lors de son palme d’or en mai 2023. Mais après l’épisode Bolloré, elle a récemment aggravé son cas en annonçant une procédure disciplinaire de la Chancellerie de la Légion d’honneur à l’endroit de Gérard Depardieu : bim, recadrée en direct dans C à vous par Emmanuel Macron, soucieux de défendre le présumé violeur et agresseur sexuel, oups pardon, l’acteur qui rend « la France fière». Cette défense a ambiancé les réveillons et occupé les médias pendant la période creuse des fêtes à coup de tribune de soutien à Depardieu fomentée par l’extrême droite et de légitime indignation qui s’en est suivie. Atteignant là le but qu’Emmanuel Macron recherchait – au détriment des victimes : camoufler sous un écran de fumée le fiasco de la loi immigration, à laquelle Rima Abdul Malak s’était d’ailleurs timidement opposée.

Car c’est bel et bien une lecture politique qu’il faut faire de cette éviction de Rima Abdul Malak – et de la nomination de Rachida Dati. « Ce n’est pas l’affaire Depardieu qui a joué, estime un spécialiste de la Macronie, ce sont les propos sur Bolloré de Rima Abdul Malak en février de l’année dernière qui ont fini par jouer. Quand la ministre a tenu ces propos, elle est devenue une ministre que CNews, C8, Europe 1, Paris Match, Le JDD ont pris en grippe. En faisant le choix de la remplacer, le Président leur envoie un message de pacte de non agression : je vous enlève la ministre qui vous a tapé dessus. C’est ça qui s’est joué. »

Plus largement, ne pas s’opposer aux médias Bolloré, c’est ne pas prendre de front l’extrême droite à laquelle la galaxie CNews, C8, Europe 1, Paris Match, JDD sert de haut-parleur. « Emmanuel Macron est dans un moment où il s’adresse à d’autres publics. C’est ce qu’on constate dans ce remaniement en général, pas que dans la culture, juge l’interlocuteur des Jours. L’important dans l’affaire Depardieu, ce n’est pas qu’il dise que la ministre s’est trop avancée. Le vrai sujet c’est que le Président a repris, à la ligne près, l’ensemble des arguments qui étaient développés sur CNews et sur le plateau d’Hanouna en allant jusqu’à remettre en doute le fait que le sujet de Complément d’enquête puisse être correctement monté. Là, le Président remet en doute ce travail-là, celui de Complément d’enquête qui est quand même le service public. »

Un service public inlassablement attaqué par l’extrême droite et donc par les médias Bolloré comme étant un ramassis de gauchistes. À la triangulation politique (c’est-à-dire reprendre les idées de l’adversaire pour en faire les siennes) largement illustrée par le présent remaniement, Emmanuel Macron ajoute la triangulation médiatique. « On verra dans les prochaines semaines, les prochains mois, les signaux qui sont envoyés vers Bolloré. L’ensemble des ministres qui vont au JDD, c’est déjà un signal ; quand le Président dit qu’il ne faut pas opposer les médias, c’est aussi un signal » conclut notre spécialiste de la chose médiatico-politique.

Et que dit-on de la nomination de Rachida Dati du côté du service public, justement ? Dans les hauts étages de France Télévisions, on se montre prudent : « On est surpris, mais on verra. Elle porte des sujets comme la diversité et la place des femmes. On espère qu’elle défendra le reste...» D’autres prennent moins de pincettes : « Le problème de cette nomination, ce n’est pas Rachida Dati, c’est Macron. Après Depardieu, c’est ouf… »

Avec Rachida Dati, le monde de la culture a la pénible impression de servir de « variable d’ajustement »

Ça fait chic : le ministère se retrouve de surcroit sous l’autorité d’une femme mise en examen pour corruption passive (« présomption d’innocence », a balayé Gabriel Attal jeudi au 20 heures de TF1, mais attendons tout de même les réquisitions du Parquet national financier, attendues dans les prochaines semaines) et dotée d’une réputation absolument justifiée de teigne. En témoigne, au hasard et parmi tant d’autres, sa sortie d’il y a à peine deux ans sur la République en marche, « un parti de traîtres de gauche et de traîtres de droite », vipérait sur France Inter celle qui sitôt l’annonce de sa nomination a été virée des Républicains.

L’arrivée de Rachida Dati rue de Valois est de fait une désagréable surprise pour le secteur de la culture, qui a la pénible impression de « servir de variable d’ajustement », comme le dit Olivier Darbois, président du Prodiss, le principal syndicat des organisateurs de concerts. « Mais je ne dirai rien sur elle en amont, continue-t-il, prudent. Voyons comment ça se passe, puisque c’est le choix du gouvernement… Enfin, d’Emmanuel Macron. »

Un choix issu d’un deal : Rachida Dati aurait négocié son débauchage en échange d’une candidature unique LR-Renaissance à la mairie de Paris en 2026. Pari risqué : trois ans, c’est loin. « Elle n’est pas connue pour arpenter les salles de spectacle ou les musées, confirme en forme de litote une actrice du secteur de la musique. Son arrivée au gouvernement, c’est clairement avant tout une prise de guerre pour Macron, un marche-pied. Je ne sais pas ce qu’elle va apporter au ministère. »

Et de pointer un double gros sujet qui risque de peser lourd dans cette année 2024 d’élections européennes et de prise de positions avant la course à la présidentielle : « On se demande comment elle va se positionner sur la question de la liberté d’expression. » Rachida Dati, ministre sarkozyste jusqu’aux os, peut-elle défendre les spectacles et films attaqués de partout par la nébuleuse de l’extrême droite, ainsi que le raconte notre enquête Orgues et préjugés ?

Quant à contrer l’emprise de Vincent Bolloré, la blague est vaste quand on entend un Cyril Hanouna louer régulièrement Rachida Dati dans Touche pas à mon poste, sur C8. Et qu’on connaît la proximité de son mentor, Nicolas Sarkozy, avec Vincent Bolloré dont il a poussé l’OPA sur le groupe Lagardère – pratique, il en est un des administrateurs. « Mes collègues disent tous la même chose, pointe un interlocuteur de la musique, elle est quand même très proche du monde de l’argent et des grands groupes. Face à Bolloré ou Drahi, c’est pas rassurant. »

N’ayez pas peur.

Rachida Dati lors de son arrivée au ministère de la Culture

Son premier test sur ces questions se jouera peut-être dès la semaine prochaine. Rima Abdul Malak était attendue aux Bis de Nantes, les gigantesques Biennales internationales du spectacle vivant, pour prendre la parole en clôture d’un débat sur la liberté d’expression. Personne ne sait encore si Rachida Dati honorera le rendez-vous. Lors de la passation de pouvoir ce vendredi, elle n’a fait que reprendre la seule antienne de droite vis-à-vis de la culture, celle d’André Malraux sur la mission du ministère qu’il fonda, à savoir « rendre accessible au plus grand nombre les œuvres capitales de l’humanité ». « N’ayez pas peur », a-t-elle aussi lancé au monde de la culture et de l’audiovisuel qui tremble pourtant déjà. Enfin, pas dans la galaxie Bolloré où les bouchons sautent.

L’éviction de Rima Abdul Malak et son remplacement par Rachida Dati : le symbole et le résumé du gouvernement de Gabriel Attal où sont châtiés les (rares) opposants à la loi immigration, tel Clément Beaune viré des Transports, et intronisés ministres des militants de droite. Ça a au moins l’avantage d’en finir avec cette fable d’une Macronie ni de gauche, ni de droite : désormais, c’est ni de gauche, ni de gauche. Ainsi Catherine Vautrin, encore récemment encartée chez les Républicains et qui avait été pressentie à Matignon en mai 2022 avant que le choix élyséen se porte sur Élisabeth Borne, prend le ministère de la Santé où ses positions contre le mariage pour tous – un « rendez-vous raté » a-t-elle opportunément et tardivement reconnu en 2023 – laissent augurer de délicats arbitrages alors que l’IVG doit entrer dans la Constitution cette année. De la même eau saumâtre, Aurore Bergé, désormais en charge de l’égalité femmes-hommes et de la lutte contre les discriminations, qui, outre son opposition, passée dit-elle, au mariage pour tous et à l’adoption par des personnes homosexuelles, ne masque pas ses idées transphobes, ainsi que le rappelait récemment notre série La vie des genres.

Hormis la surprise Dati, ce gouvernement maintient à leurs gros ministères de bonhommes les Darmanin, Le Maire et Dupont-Moretti

Parmi les quatorze ministres nommés jeudi soir – la valetaille des secrétaires d’État attendra –, on trouve, à l’image du premier d’entre eux, des fidèles macronistes dont la compétence principale tient dans le petit doigt, bien aligné sur la couture du pantalon, comme Stéphane Séjourné, disciple de la première heure, qui prend en charge les Affaires étrangères, ou Prisca Thévenot, désormais porte-parole à la place d’Olivier Véran. On redoute également une vague de burn-out dans certains ministères fourre-tout, tels celui d’Amélie Oudéa-Castéra qui, en plus des Sports, se retrouve carrément chargée de l’Éducation nationale ou celui de Catherine Vautrin qui devra concilier Travail et Santé – ô, ironie.

Hormis les surprises Attal et Dati, l’ossature globale de ce gouvernement fait furieusement penser à la précédente avec Gérald Darmanin, Bruno Le Maire, Éric Dupont-Moretti et Sébastien Lecornu tous maintenus à leurs gros ministères de bonhommes qui, visiblement, ne souffriraient pas d’être dirigés par des femmes, une constance chez Emmanuel Macron que de les garder à des fonctions périphériques. Lequel président de la République a réuni vendredi à 11 heures le gouvernement qu’il a formé et à la tête duquel il a nommé son succédané pour un premier conseil des ministres.

Agglutinée autour d’une petite table pour faire genre, l’équipe s’est vue coacher par un Emmanuel Macron mi-gourou, mi-courroux : « Je ne veux pas d’états d’âme, je veux des états de service », a-t-il lancé enjoignant ses troupes de lutter contre « le grand effacement » de la France. Avec un ultimatum : « Si vous ne vous en sentez pas capable, quittez cette pièce à l’instant. » Personne n’a moufté.


¹Gabriel Attal Petit soldat du macronisme

Il est le quatrième Premier ministre d’Emmanuel Macron : à 34 ans, Gabriel Attal a été nommé à Matignon le 9 janvier 2024 en remplacement d’Élisabeth Borne. Celle-ci aura tenu vingt mois à la tête de la majorité relative sortie des urnes deux mois après la réélection d’Emmanuel Macron : vingt mois, 23 recours à l’article 49.3, une réforme des retraites injuste, une loi immigration votée grâce à l’extrême droite, beau bilan. Si comme sa prédécesseure, Gabriel Attal a démarré à gauche, lui a été des tout premiers fidèles d’Emmanuel Macron, le rejoignant dès 2016 et lui collant aux basques depuis, au point d’en devenir une espèce de clone. Porte-parole d’En marche, puis du gouvernement, il devient ministre des Comptes publics en 2022 avant de succéder à Pap Ndiaye à l’Éducation nationale en juillet 2023 jusqu’à être bombardé six mois plus tard à Matignon.

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Selon nos informations, Margaux, une ancienne militante centriste de 37 ans qui accuse le député Damien Abad de l’avoir violée en 2011, s’est constituée partie civile dans l’instruction pour « viol » et « tentative de viol » qui vise l’ancien ministre.


Selon nos informations, Margaux, une ancienne militante centriste de 37 ans qui accuse le député Damien Abad de l’avoir violée en 2011 et qui avait témoigné dans Mediapart, s’est constituée partie civile mercredi 10 janvier.

Il s’agit de la troisième plainte dans cette affaire, qui fait l’objet d’une information judiciaire pour « viol » et « tentative de viol » contre l’ancien ministre de 43 ans. Le député de l’Ain, qui bénéficie de la présomption d’innocence, a toujours contesté les accusations dont il fait l’objet.

En mai 2022, Mediapart avait révélé plusieurs témoignages mettant en cause son comportement avec les femmes. L’une d’elles avait porté plainte pour « tentative de viol », déclenchant l’ouverture d’une enquête préliminaire. Un mois après sa nomination comme ministre des solidarités, Damien Abad n’avait pas été reconduit à l’occasion du remaniement.

En juin 2023, le député avait été entendu par les policiers de la brigade de répression de la délinquance à la personne (BRDP) et placé en garde à vue. Puis une information judiciaire avait été ouverte, confiée à la juge d’instruction Cécile Meyer-Fabre. 

Margaux (il s’agit de son vrai prénom) avait déjà porté plainte pour « viol » en 2017 contre le député de l’Ain, mais l’enquête avait été classée sans suite, après des investigations peu approfondies. En mai 2022, elle avait témoigné dans Mediapart, y compris dans notre émission.

Jointe ce jeudi, la trentenaire explique que sa décision de s’engager à nouveau dans une procédure judiciaire a été « très difficile » à prendre. « Lorsque j’ai reçu, en juillet, un “avis à victime” de la justice m’invitant à me constituer partie civile, je n’avais pas envie de le faire, et en même temps je n’avais pas envie de ne pas le faire, car il y a un devoir de sororité. Je ne peux pas laisser les deux plaignantes seules, je l’ai vécu, c’est très dur », relate-t-elle à Mediapart.

Aujourd’hui j’ai un peu d’espoir car je ne suis plus toute seule. Et dans ces affaires, on le sait, il faut être des dizaines pour être entendues.

Margaux à Mediapart, le 11 janvier 2024.

Elle garde d’ailleurs en mémoire le classement sans suite de sa première plainte. « À l’époque, je me suis complètement effondrée, je ne comprenais pas. Être en colère pendant des années, c’est dur. Aujourd’hui j’ai un peu d’espoir car je ne suis plus toute seule. Et dans ces affaires, on le sait, il faut être des dizaines pour être entendues. »

« Par ailleurs, ce serait une douleur de ne pas me voir reconnaître victime dans le cas où Damien Abad serait condamné dans cette affaire », ajoute-t-elle, précisant qu’elle est aussi en mesure d’affronter financièrement cette procédure puisqu’elle bénéficie de l’aide juridictionnelle.

Le contexte actuel a également joué dans sa décision : « La société est en train de changer, l’aspect systémique est reconnu. On sait aussi que le fait de nous entendre peut faire du bien aux victimes d’autres hommes. »

Des faits remontant à 2011

Cette ancienne militante centriste a rencontré Damien Abad en 2009, lors d’une réunion politique. À l’époque, elle a 22 ans et est vice-présidente des Jeunes démocrates à Paris ; Damien Abad, lui, a 29 ans, et est déjà député européen et président des jeunes du Nouveau Centre. Quelques mois plus tard, l’élu aurait selon elle « commencé à [la] draguer par SMS », puis un « flirt » s’était engagé par SMS.

Leurs échanges, consultés par Mediapart, montrent un jeune homme insistant. À ce moment déjà, Margaux avait été échaudée par plusieurs SMS, dans lesquels l’élu insistait pour avoir une photo de sa poitrine alors qu’elle avait refusé à plusieurs reprises ; il lui demandait qu’elle porte, lors de leur rencontre, sa robe « la plus sexy et décolletée » avec « porte-jarretelles talons aiguilles et dessous en dentelle » ; ou bien il faisait le forcing pour venir chez elle vers minuit et demi alors qu’elle déclinait.

Mais chaque fois, l’élu, voyant sa réaction, rétropédalait en plaidant l’humour, puis la relançait. Elle avait accepté sa proposition de venir chez elle un soir de janvier 2011, en pensant dîner avec lui. Mais il était arrivé après le repas, en raison des vœux du chef de l’État, Nicolas Sarkozy : « Prends des fraises j’apporte le champagne », lui avait-il écrit sur le chemin, réclamant encore la « belle robe », « avec un décolleté ».

« Je ressentais un risque », a indiqué Margaux aux policiers lors de son audition, en 2017. En témoigne le fait qu’elle avait demandé à un ami proche de l’appeler « à des heures régulières pour savoir si tout allait bien », avec « un code » en cas de problème. Ce que ce dernier a confirmé aux enquêteurs et à Mediapart.

Ce soir-là, elle assure avoir dit « plusieurs fois » à Damien Abad qu’elle buvait peu, mais il aurait « insisté » et ils auraient fini toute sa bouteille de champagne. Elle décrit ensuite une relation sexuelle empreinte « d’irrespect, d’injonction et d’insistance », à laquelle elle aurait plusieurs fois essayé de mettre fin, par des « sous-entendus » et stratégies d’évitement.

Elle prétend qu’après un début de relation consentie, l’élu lui aurait imposé une pénétration anale, alors qu’elle avait dit non de manière « affirmée », « à plusieurs reprises », et qu’elle avait arrêté de bouger. « Je lui ai dit qu’il se voyait dans un film porno. Il m’a dit d’être gentille et il continuait », a-t-elle déclaré aux policiers. « Revenir sur ces faits est toujours douloureux, d’autant plus publiquement », expliquait-elle à Mediapart en 2022 (lire son récit complet).

Après cette soirée, les contacts s’étaient interrompus brutalement. Jusqu’à un SMS qu’elle lui avait envoyé cinq mois plus tard : « Il va falloir qu’on parle. À propos de la dernière fois où l’on s’est vus. [...] Ton irrespect, tes pratiques, ton insistance, ton silence après m’ont choquée. Ça fait cinq mois que j’en reste traumatisée. Je ne sais pas quoi faire. » En face, le député avait manifesté de l’incompréhension, puis ajouté : « Je suis vraiment désolé si tu l’as mal pris. » Il évoquait de son côté « une bonne soirée », un rapport consenti et « respectueux », et lui proposait de la revoir « autour d’un café cette fois ». « J’ai trouvé que ce texto était une manière de se couvrir », avait indiqué Margaux aux policiers.

Dès 2011, la militante centriste songe à porter plainte. L’année suivante, elle appelle la ligne d’urgence « SOS viol ». « Deux ou trois fois », elle pousse la porte du commissariat du XVIe arrondissement de Paris. Ce n’est que le 20 février 2012, à 23 h 20, qu’elle parvient enfin à livrer son témoignage à une policière, mais sans confirmer son dépôt de plainte au final. Si la jeune femme hésite, c’est qu’elle ne veut « pas faire de mal » à Damien Abad et qu’elle a peur des conséquences, sur sa carrière notamment. 

Le député l’« impressionnait » par son parcours de jeune premier et son lien avec le chef de l’État, « intimidant ». Elle voyait aussi en lui « un supérieur hiérarchique politique », « une des pistes les plus sérieuses » pour obtenir le poste d’assistante parlementaire qu’elle recherchait à l’époque, a-t-elle dit aux policiers. La jeune femme leur avait détaillé la « contrainte psychologique » qu’aurait exercée Damien Abad sur elle : « On n’est pas obligée d’avoir un couteau sous la gorge pour être contrainte de faire quelque chose. »

Une plainte d’abord classée faute de « preuves suffisantes »

Auditionné à l’époque, Damien Abad avait quant à lui décrit une relation sexuelle « consentie », dont la plaignante aurait été à l’initiative, le déshabillant et le rhabillant – ce qu’il ne pouvait faire seul en raison de son handicap (il souffre d’arthrogrypose, qui atteint la mobilité de ses quatre membres). Il affirmait qu’il n’y avait eu, durant cette soirée, « ni violence, ni agressivité, ni une quelconque contrainte morale », ni « d’insistance, d’irrespect ou de pratiques non consenties ». « Du premier baiser jusqu’à la fin de notre rapport sexuel, rien ne s’est fait et ne pouvait se faire sans sa volonté », assurait-il. S’il savait effectivement que la jeune militante était « à la recherche d’un positionnement dans le monde politique », il avait contesté tout « lien hiérarchique ».

Du premier baiser jusqu’à la fin de notre rapport sexuel, rien ne s’est fait et ne pouvait se faire sans sa volonté.

Damien Abad lors de son audition par les policiers, en 2017.

À dix reprises, face aux questions des policiers sur le déroulé de la soirée et sur le SMS dans lequel la plaignante faisait part d’un problème, le député avait répondu ne pas se souvenir. Interrogé sur les « injonctions » sexuelles évoquées par Margaux, il avait reconnu qu’« il y a[vait] peut-être eu des demandes de [sa] part », mais « à aucun moment de contrainte physique ou morale ». Enfin, il avait pointé le calendrier de la plainte, en pleine campagne présidentielle – il était alors le porte-parole du candidat François Fillon.

L’enquête, résumée en trois pages dans le procès-verbal de synthèse, n’avait pas été approfondie. Ni l’entourage de Damien Abad, ni ses assistant·es, ni les cadres ou militant·es de son parti n’ont été auditionnés. La justice n’avait pas non plus mandaté d’expert médical pour établir objectivement ses facultés physiques. La procédure avait été classée sans suite au motif d’une infraction insuffisamment caractérisée, « l’enquête n’ayant pas permis de rassembler des preuves suffisantes ». 

Sept ans plus tard, c’est dans un autre contexte que Margaux dépose plainte : deux autres femmes, qui ont elles aussi témoigné dans Mediapart en 2022, se sont constituées parties civiles : Laëtitia*, une élue centriste qui a porté plainte pour « tentative de viol » ; et Chloé*, qui affirme avoir été violée par Damien Abad après avoir fait un « black-out » en buvant une coupe de champagne offerte par l’élu, en 2010. Toutes deux soupçonnent l’élu de les avoir droguées, ou d’avoir tenté de le faire.

Lors de nos révélations, Damien Abad avait contesté « avec la plus grande fermeté toute accusation de tentative de viol ou d’agression sexuelle » et promis une réplique à ces « accusations mensongères et scandaleuses ». Il avait annoncé une plainte en dénonciation calomnieuse à l’encontre de Laëtitia, la première plaignante.

Auprès de Mediapart, il avait soutenu que la maladie congénitale dont il souffrait ne lui permettrait pas d’effectuer certains gestes. Il nous avait par ailleurs assuré que *« les relations sexuelles qu’[il a] pu avoir ont toujours reposé sur le principe du consentement mutuel »-. 

En juin 2023, lors de l’ouverture de l’information judiciaire le visant, l’ancien ministre avait demandé à « être entendu rapidement par le magistrat instructeur afin de se défendre face à des accusations ignobles, qu’il conteste fermement ».

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submitted 9 months ago by NuclearPlatypus@jlai.lu to c/france@jlai.lu
[-] NuclearPlatypus@jlai.lu 0 points 10 months ago

"caméras intelligentes", "lanceurs de balles de défense", ...

[-] NuclearPlatypus@jlai.lu 2 points 10 months ago

Masque FFP2 ou équivalent (KN95, KF94, N95)*

[-] NuclearPlatypus@jlai.lu 2 points 10 months ago

Hello,

Merci je n'étais pas au courant de cette règle.

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NuclearPlatypus

joined 10 months ago